Gérard, 64 ans, est un patient suivi régulièrement du fait de son diabète de type 2. Nous le voyons en consultation car il présente depuis quelques heures une douleur, importante, constrictive, au niveau thoracique qui lui coupe la respiration. L’ECG effectué au cabinet ne met en évidence aucune anomalie.
Cependant, compte tenu de sa symptomatologie, le patient est rapidement orienté vers une unité d’urgence.
Parmi les premiers examens effectués, le dosage de la troponine revient très positif (297 ng/l, N < 14), et la coronarographie réalisée dans la foulée se révèle normale. Du fait des caractéristiques cliniques et biologiques observés, une IRM est réalisée. Cet examen permet d’objectiver un infarctus du myocarde sous endocardique de moins de 25 % de la paroi septale de la cavité gauche sur la moitié d’un segment (cliché 1).
En fait ce tableau correspond à une entité spécifique : le Minoca.
INTRODUCTION
Le Minoca (myocardial infarction with non obstructive coronary arteries) correspondent à un infarctus du myocarde sans obstruction coronaire significative (absence de sténose ≥ 50 %). Ce type d’infarctus représente environ 5 % de l’ensemble des infarctus du myocarde, touchant des patients généralement un peu plus jeunes (âge moyen de 58 ans). Les femmes sont davantage concernées et fréquemment on ne retrouve pas ou peu de facteurs de risques classiques de coronaropathie (dyslipidémie, diabète, tabac, hypertension artérielle, antécédents familiaux).
ÉTIOLOGIES
Les Minoca sont dus à une souffrance myocardique ischémique qui peut relever de différentes origines :
- embolies ou thromboses coronaires. Dans ces situations il est important de rechercher des anomalies de l’hémostase (voir ci-dessous) ;
- anomalies fonctionnelles au niveau microvasculaire ;
- vasospasme coronaire épicardique secondaire à une dysfonction endothéliale. Celle-ci peut être due à la prise de certaines substances psychoactives (cas de la cocaïne), ou des chimiothérapies (comme le 5- FU) ;
- rupture ou érosion de plaque athéromateuse non obstructive ;
- dissection coronaire spontanée.
DIAGNOSTIC
La symptomatologie est celle objectivée dans un infarctus du myocarde.
Après avoir écarté une coronaropathie obstructive avec l’angiographie, l’IRM reste l’examen complémentaire de choix pour poser le diagnostic (confirmation du diagnostic dans 90 % des cas). Elle confirme le diagnostic d’infarctus sous-endocardique (rehaussement tardif), et objective un œdème et un trouble cinétique segmentaire en cas d’infarctus sous-épicardique (cliché ci-dessus).
L’imagerie endocoronaire par ultrason intravasculaire, et l’OCT (optical coherence tomography) sont utiles pour identifier l’étiologie (mise en évidence d’un thrombus ou d’une dissection) du Minoca. Des tests de provocation par méthylergométrine peuvent permettre d’éliminer un vasospasme. Enfin il est parfois utile de faire un bilan biologique spécifique pour identifier une étiologie en rapport avec un trouble de la crase sanguine (déficit en facteur V de Leiden, antithrombine III, résistance à la protéine C ou S, purpura thrombocytopénique, syndrome myéloprolifératif), mais aussi des maladies de système (syndrome des antiphospholipides).
PRISE EN CHARGE
Le traitement dépend de la cause sous-jacente. Au delà des traitements classiques (antiagrégation, IEC ou ARA II, statine +/- bêta bloquant ), des traitements complémentaires peuvent être administrés en fonction de l’étiologie (par exemple, inhibiteur calcique en cas de vasospasme).
Le pronostic est réputé meilleur que celui d’une coronaropathie obstructive (taux de mortalité sur un an de 4,7 %) mais varie selon l’étiologie.
Bibliographie
(1) Ferrante A, Kerneis M. Les pièges diagnostiques (MINOCA). Réalités cardiologiques 2022 ;370:16-20
(2) Tamis-Holland JE et al. Contemporary diagnosis and management of patients with myocardial infraction in the absence of obstructive coronary artery disease : A scientific statement from the American heart association. Circulation 2019 ;139:e891-e908
(3) Pernès JM, et al. Infarctus du myocarde, MINOCA : définition et recommandations. Sang Thrombose et Vaisseaux 2021 ;33(2):80-97
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