Après la fibrillation auriculaire, l’embolie pulmonaire (EP)… Alors qu’en 2012, le Congrès européen de cardiologie avait consacré l’arrivée des NACOs ou AOD (AnticoagulantS Oraux Directs) dans la fibrillation auriculaire, l’édition de cette année (Barcelone, 29 août-2 septembre) aura été l’occasion d’officialiser leur entrée dans l’embolie pulmonaire.
Présentées à Barcelone, les nouvelles recommandations sur l'embolie pulmonaire établies par l'European Society of Cardiology (ESC) et approuvées par l'European Respiratory Society (ERS) amènent en effet certains changements par rapport à celles de 2008. Avec notamment, une simplification des scores cliniques
prédictifs, l'ajustement des D-dimères en fonction de l'âge mais, surtout, la reconnaissance des NACOs en tant qu'alternative thérapeutique.
Nouvelle alternative dans l’EP à risque faible ou intermédiaire
Dans les EP à risque faible ou intermédiaire, les précédentes recommandations préconisaient après un traitement initial de 5 jours par héparinothérapie la prise d'AVK pendant au moins trois mois, éventuellement suivi par un traitement d'entretien visant à éviter la récidive, d'une durée « indéterminée » en réévaluant régulièrement le rapport bénéfice/risque individuel.
Pour les experts, les NACOs constituent désormais une alternative dans ces EP. Ils sont prescrits d'emblée, dès la phase initiale pour le rivaroxaban (15 mg, 2 fois par jour pendant 3 semaines puis 20 mg une fois par jour) ou l'apixaban (10 mg, 2 fois par jour pendant 7 jours puis 5 mg, 2 fois par jour). Le dabigatran (150 mg, 2 fois par jour, 110 mg pour les plus de 80 ans ou les patients sous verapamil) et l'edoxaban sont débutés après l'héparinothérapie initiale pour le traitement d'entretien. Le praticien a donc le choix entre
trois types de traitement : traitement par héparine/AVK, héparine/NACOs ou NACOs seul (approche « single
drug »). « Une revue des études menées avec les NACOs chez plus de 11 500 personnes montre que par rapport au traitement classique, leur prescription réduit de 70 % les saignements majeurs », souligne Giancarlo Agnelli (Italie).
On manque toujours de données sur la durée du traitement. Il doit être d'au moins 3 mois dans l'EP sans FR favorisants ou avec FR réversible. Il est recommandé de le poursuivre «?au long cours » avec réévaluation régulière du rapport bénéfice/risque lors d'une récidive d'EP sans FR et se discute lors du premier épisode d'EP sans FR si le risque de saignement est bas. Dans ce cadre, le recours au rivaroxaban, dabigatran ou apixaban est possible mais on manque de recul pour l'edoxaban.
L'utilisation de l'aspirine en prophylaxie secondaire doit être réservée uniquement en cas de refus du patient ou d'intolérance aux autres anticoagulants.
Dans l'EP à faible risque, les recommandations insistent par ailleurs sur l'importance d'un retour précoce à domicile où sera poursuivi le traitement per os.
Les EP à haut risque bénéficieront quant à elles de la prise en charge classique après thrombolyse, voire embolectomie chirurgicale ou percutanée en cas d'échec ou de contre-indications à la thrombolyse. « On tend maintenant à préférer l'association d'une thrombolyse délivrée à la fois par voie parentérale à faible dose et par voie percutanée », précise Stavros Konstantinides (Allemagne).
La place d'un filtre veineux est limitée maintenant aux contre-indications des anticoagulants en phase aiguë ou à distance aux récidives malgré une anticoagulation efficace.
L’interprétation des D-Dimères s’affine
Sur le plan diagnostique, les choses bougent aussi. Le cut-off pour les D-Dimères doit être maintenant ajusté à l'âge. En effet, les D-dimères augmentent de façon physiologique avec l'âge et l'analyse rétrospective de cohorte montre que si le seuil est de 500 ng/l avant 50 ans, il est ensuite égal à l'âge du patient multiplié par 10 (soit par exemple 750 pour un patient de 75 ans). Ce nouveau cut-off a été validé par l'étude AJUST. « Rappelons que le dosage des D-dimères n'a d'intérêt que chez les patients pour lesquels la probabilité de faire une EP est faible ou intermédiaire afin d'éviter des examens irradiants inutiles et non lorsque l'EP est très probable puisque sa normalité ne peut l'exclure EP », explique Arnaud Perrier (Genève).
Les stratégies thérapeutiques se basent toujours sur l'évaluation du pronostic de l'EP par des scores cliniques. Il est licite d'utiliser les versions simplifiées des scores de Genève ou de Wells dont la valeur pronostique est équivalente.
En ce qui concerne l'imagerie, il n'y a pas de nouvelles recommandations si ce n'est pour préciser que l'IRM de perfusion n'est pas adaptée au diagnostic de l'EP, sa normalité ne permettant pas de l'exclure.
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