L’asthme est la première maladie chronique pédiatrique et toucherait près d’un enfant sur dix en France. Encore faut-il que le diagnostic soit correctement posé. « On peut estimer qu’un enfant asthmatique sur deux n’est pas diagnostiqué, évalue le Dr Étienne Bidat, allergologue-pneumo-pédiatre (hôpital Amboise-Paré, Boulogne-sur-Seine). En premier lieu parce que ces asthmes présentent des expressions typiques, mais trop souvent mises sur le compte d’une virose (“bronchite sifflante”, bronchite asthmatiforme”, etc.) ». De plus, « les “symptômes d’asthmes” (sifflements et toux nocturnes ou à l’arrêt de l’effort, dyspnées) présents entre les épisodes d’exacerbation passent trop souvent inaperçus », précise le Dr Ania Carsin, allergologue-pneumo-pédiatre à l’hôpital de la Timone (Marseille).
Du sous-diagnostic au sur-diagnostic
À l’inverse, le sur-diagnostic d’asthme chez l’enfant semble aussi bel et bien exister comme le suggèrent, deux publications récentes. Dans un article publié début avril*, le
Pr Andrew Bush et le Dr Louise Fleming se demandent même si après des années de sous-diagnostic nous n’allons pas dans la direction opposée, avec un retour de balancier et une banalisation du diagnostic d’asthme. Compilant études et constats, ils pointent notamment l’absence trop fréquente de preuves objectives pour étayer le diagnostic d’asthme.
Au final, les auteurs déplorent que de nombreux enfants soient traités inutilement. Deux mois plus tôt, une étude néerlandaise** rétrospective conduite en soins primaires allait dans le même sens, affirmant que ce sur-diagnostic concernerait plus d'un enfant sur deux entre 6 et 18 ans (53,5 % dans cette étude).
Réévaluer l’hypothèse diagnostique initiale
Selon Étienne Bidat, pour éviter l’écueil du sur-diagnostic, la clé est dans la réévaluation par les médecins de l’hypothèse diagnostique initiale et la réalisation des épreuves fonctionnelles respiratoires. « Lorsqu’un traitement de crise (corticoïdes inhalés) est prescrit au décours d’une hospitalisation notamment, le diagnostic est rarement remis en cause ou étayé par des preuves objectives », regrette-t-il. Dans l’étude néerlandaise par exemple, une spirométrie n'avait été réalisée que chez près de 16 % des enfants diagnostiqués comme asthmatiques. L’EFR n’est pas réalisable avant 5 ans en pratique courante.
Mais, passé cet âge, elle doit être réalisée chez tous les enfants asthmatiques à la recherche d’un syndrome obstructif réversible. « La spirométrie peut être normale chez l’enfant, même chez les asthmatiques sévères, prévient Ania Carsin. En cas de doute (comme une toux chronique sans sifflement), un test de réactivité bronchique à la métacholine élimine le diagnostic d’asthme s’il revient négatif. » Si le test est positif on ne peut pas conclure car 50 % des sujets non asthmatiques ont un test positif. Il faut alors suivre les enfants et réévaluer le traitement de l’asthme tous les 3 à
6 mois voire le stopper si besoin et surveiller l’enfant.
La toux a trop souvent bon dos
Les difficultés diagnostiques de l’asthme infantile sont avant tout liées à son mode d’expression. La toux est un des signes d’asthme chez l’enfant mais « toux » ne signifie pas forcément « asthme » et des manifestations non typiques sifflantes peuvent être trop vite assimilées à une toux asthmatique. « La toux asthmatique possède certaines caractéristiques ; c’est une toux sèche, nocturne, quinteuse, qui répond aux bêta 2 mimétiques mais c’est aussi la toux d’arrêt d’effort qui évoque également une "toux équivalent d’asthme" », précise le Dr Carsin.
Enfin, il ne faut pas oublier les autres diagnostics différentiels : inhalation d’un corps étranger ou cardiopathie notamment. Par ailleurs, les pneumopédiatres sont de plus en plus souvent confrontés à des syndromes d’hyperventilation pulmonaire fonctionnelle encore mal étiquetés et pris à tort pour de l’asthme.
*ADC Online First, published on April 5, 2016 as 10.1136/archdischild-2015-309053.
**British Journal of General Practice, March 2016.
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