La Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees) a dénombré 9 200 décès par suicide en 2022, soit un taux brut de 13,4 décès pour 100 000 habitants dans le sixième rapport de l’Observatoire national du suicide (ONS). Il est en augmentation de 0,4 point par rapport à 2021, en raison d’une hausse notable des suicides chez les hommes de plus de 85 ans et les femmes jeunes.
Même si le suicide est la deuxième cause de mortalité chez les moins de 25 ans, son taux est le moins élevé : 2,7 décès pour 100 000 contre 13,3 en population générale. Les jeunes femmes ont le taux de suicide le plus faible en France mais il a augmenté de 40 % entre 2020 (1,15 pour 100 000) et 2022 (1,6 pour 100 000), d’après le rapport.
Les plus de 85 ans sont particulièrement à risque de décès par suicide : 35,2 pour 100 000, trois fois plus qu’en population générale. Le taux de suicide des hommes de 85 à 94 ans a drastiquement augmenté entre 2021 et 2022, passant de 77 à 86 décès pour 100 000 habitants. Le risque des âgés est huit fois plus élevé que les femmes et 25 fois plus important que les hommes de moins de 25 ans.
Les jeunes femmes plus souvent hospitalisées pour TS
Les hommes décèdent davantage par suicide que les femmes, mais les hospitalisations pour gestes auto-infligés (GAI : dénomination rassemblant les tentatives de suicide [TS] et les automutilations non suicidaires) sont bien plus fréquentes pour ces dernières et en large hausse pour celles de moins de 25 ans. Pour 113 garçons de 15 à 19 ans sur 100 000 hospitalisés pour GAI en 2023, elles sont 516 adolescentes et jeunes femmes du même âge sur 100 000, un taux brut en augmentation de 46 % par rapport à 2017.
En 2022, d’après l’enquête Escapad, près d’un quart des adolescentes de 17 ans a déclaré avoir eu des pensées suicidaires au cours de l’année et environ 5 % disent avoir fait une TS les ayant menées à l’hôpital au cours de leur vie. Chez les hommes de 30 à 59 ans et les femmes de 30 à 69 ans les hospitalisations pour GAI sont en baisse et les inégalités de genre dans le suicide se réduisent. Mais cette baisse ne se retrouve pas dans le taux de suicide à ces âges. Ainsi « ce paradoxe illustre les limites d’une prévention du suicide qui serait basée uniquement sur la prévention des tentatives de suicide », lit-on dans le rapport de la Drees.
Comprendre le pourquoi de phénomènes alarmants
Quelque 77 601 personnes de plus de 10 ans, dont 64 % de femmes, ont été hospitalisées au moins une fois pour GAI en 2023. L’étude observe une forte sous-déclaration des GAI dans les services psychiatriques pour différentes raisons : « désaccord sur l’objectif de réutilisation des données, manque de ressources administratives, refus de figer un diagnostic… ».
La Drees relève aussi une influence du statut socio-économique sur le risque d’hospitalisation pour GAI. Chez les 20 % les plus pauvres, il est presque trois fois supérieur à celui des 20 % les plus aisés. Ici aussi les inégalités de genre persistent : les jeunes femmes pauvres sont hospitalisées sept à huit fois plus que les jeunes hommes aisés. Les jeunes « hors ménage » (sans abri, internat, foyers, résidences sociales), les adolescentes vivant avec un parent isolé et les jeunes mères seules sont bien plus hospitalisés que ceux cohabitant avec leurs parents.
L’ONS qualifie d’alarmante cette « hausse brutale et pérenne des hospitalisations pour GAI chez les jeunes filles, ainsi que les premiers indices d’une hausse des décès par suicide chez les jeunes femmes, d’un point de vue de santé publique ». L’instance pointe le manque d’explications empiriquement fondées qui permettraient de comprendre ce phénomène aux facteurs multidimensionnels et intriqués. Elle exhorte aussi à interroger la santé mentale des jeunes garçons en envisageant « l’existence de comportements autoagressifs qui échapperaient aux indicateurs standards » et à porter une attention accrue à l’analyse des trajectoires. Et ce afin d’appréhender les inégalités face au risque suicidaire dans ses dimensions territoriales et « d’éclairer les raisons de la baisse des hospitalisations aux âges intermédiaires, tout en apportant les éléments de compréhension du développement du risque suicidaire au grand âge qui font si cruellement défaut aujourd’hui », conclut le rapport.
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