« La récente communication de MM. Gilbert et L. Gauthier sur l’emploi de l’opothérapie hépatique dans les affections du foie et de la bile de bœuf dans la lithiase biliaire, éveillent les vieux souvenirs de traditions populaires. L’expression “ il se mange les foies ”, appliquée couramment dans le peuple à une personne inquiète, lypémaniaque, qui se tourmente au point de maigrir et de voir sa santé péricliter, explique bien que la tradition populaire voit dans le foie un organe important qui est attaqué dans “ les maladies noires ”.
Le vautour de Prométhée lui ronge le foie éternellement renaissant ! Dans Beroalde de Berville, nous trouvons que Laurence, très portée aux débats amoureux, “ aimait de bon foie ”. Foie est ici synonyme d’organe des passions amoureuses.
M. Brissaud a relevé dans “ L’Antidote de l’amour, avec un ample discours contenant la nature et les causes d’iceluy, ensemble des remèdes les plus singuliers pour se préserver et guérir les passions amoureuses ” de Jean Aubery cette phrase : “ L’appétit d’union est situé dans le foy qui est la cause naturelle de l’amour ”.
“ Se faire de la bile ” paraît une expression en rapport avec une idée physiologique vulgaire qui veut que les bilieux soient des tempéraments portés à la colère.
Les anciens bourreaux annamites prenaient, après les exécutions le fiel des condamnés mis à mort et ce fiel entrait dans la composition de certaines drogues qui avaient pour principal effet de rendre invulnérables ceux qui les absorbaient. Cette coutume peut se rattacher à l’idée qu’ont les Chinois et les Annamites que le foie (et non le cœur) est le siège du courage. L’expression “ il a du cœur ”, dans le sens que lui donne le père du Cid dans Corneille, “ … Rodrigue, as-tu du cœur ? ” se traduit en annamite par “ Cô-gan” : “ Il a du foie ”.
Certains guerriers chinois, récemment encore, mangeaient le foie de leurs ennemis les plus braves pour s’assimiler leurs qualités de bravoure et d’endurance. Donc, chez certains peuples, la tradition populaire trouve dans le foie ce qu’en Occident nous plaçons dans le cœur.
En France même, le foie était regardé, au XVIe siècle, comme le siège des passions amoureuses et de l’ardeur au combat de l’amour.
Aujourd’hui, la thérapeutique nouvelle nous propose la glande hépatique comme un stimulant et une panacée dans les affections déprimantes. Qu’en conclure ? Qu’il n’y a rien de nouveau sous le soleil et que “ depuis qu’il y a des hommes qui pensent ”, en médecine comme ailleurs, la roue ne fait que tourner, mais n’avance pas, et que le vieux-neuf en thérapeutique est toujours capable de redevenir à la mode.
Nos nouvelles indications de l’opothérapie n’apprendraient rien ni aux Annamites ni aux Chinois, qui mangeaient depuis longtemps le foie de leurs ennemis, réputés pour leur courage et qui pratiquaient l’opothérapie, comme M. Jourdain faisait de la prose, sans le savoir. »
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