L’immunothérapie est à la une de l’Esmo 16. Une étude de phase II présentée dimanche à Copenhague au congrès de l'European Society for Medical Oncology (Esmo) et publiée dans le Lancet Oncology* a fait grand bruit dans la capitale du royaume scandinave. Ces annonces ont constitué l’élément principal du congrès (7-11 octobre 2016). L’affluence de plusieurs milliers de médecins dans la grande salle présidentielle en fut la preuve. MSD et son « Pembro » constituait bien le « clou » de l’Esmo 16.
Poumon : une urgence absolue
1,8 million de nouveaux cas chaque année apparaissent dans le monde (2012). Le cancer du poumon est la cause la plus fréquente de décès par cancer. Les progrès jusqu’à présent ont été rares. Les traitements classiques sont à base de chimiothérapies mais l’espérance de vie n’excédait pas 1 an dans les cancers métastatiques. Le cancer du poumon est un des plus agressifs avec 10 à 15 % de survie à 5 ans. Autant dire que l’enjeu scientifique et médical est considérable. En 2012, 268 000 personnes en sont mortes. Les deux principaux types de cancers du poumon sont « non à petites cellules » (85 %) et à « petites cellules » (15 %). Les cancers à petites cellules sont les plus agressifs. Le tabac est une des principales causes de ces cancers. Les biomarqueurs font l’objet de nombreuses études. 10 sont à l’étude dans les cancers du poumon. PD-1 et PD-L1 son ligand constituent des pistes très prometteuses. Les biomarqueurs permettent de détecter et de poser un diagnostic, de prévoir les traitements et de calibrer les réponses aux traitements. Les principaux biomarqueurs sont ALK, EGFR, KRAS et PD-L1.
Anti-PD-1 et médecine très personnalisée
L'anti-PD-1 pembrolizumab est homologué dans le traitement du cancer à un stade avancé, en monothérapie et en association, en première et en seconde ligne, après une première ligne de chimiothérapie, en cas d’expression de PD-L1. Le programme de recherche a été lancé en 2011. Cette immunothérapie a aussi montré une supériorité sur la chimiothérapie en première ligne dans une population de patients avec une expression élevée de PD-L1, dans une étude de phase III présentée lors de la session présidentielle sur les immunothérapies dans le cancer du poumon (étude Keynote-024). Pour tenter d'augmenter son efficacité, l'étude de phase II Keynote-021 a évalué, pour sa part, l’association du pembrolizumab (200 mg toutes les trois semaines) et d’une chimiothérapie de carboplatine + pemetrexed (Alimta*, Lilly) avec poursuite du pembrolizumab pendant deux ans face à la chimiothérapie seule, en première ligne auprès de 123 patients ayant un cancer avancé non épidermoïde. Le cross-over était autorisé. Le critère d'évaluation principal était le taux de réponse. L’association a obtenu un meilleur taux de réponse : 55 % versus 29 % pour la chimiothérapie seule, soit 26 % de différence. Les patients n’étaient pas sélectionnés selon l’expression du biomarqueur PD-L1, mais le taux de réponse était plus élevé (80 %) quand l’expression était d’au moins 50 %. La survie sans progression était aussi allongée, avec une médiane de 13 mois vs 8,9 mois. Le risque de progression ou de décès était réduit de 47’% avec l’association. A six mois, 77 % vs 63 % des patients étaient en vie sans progression. La durée médiane sous traitement était de huit mois avec l’anti-PD-1 + chimiothérapie et 4,9 mois avec la chimiothérapie. Il reste toutefois que les résultats dépendent du taux d’expression de PD-L1. Quand ce taux est égal ou supérieur à 50 %, les résultats sont excellents. Mais seulement dans ce cas.
Séisme
Pour la Pr Reck (Allemagne), « le pembrolizumab est le nouveau standard en première ligne en cas de niveau élevé d'expression de PD-L1. Jean-Charles Soria de Gustave-Roussy à Villejuif (Val-de-Marne) pour sa part a considéré que ce médicament constituait une grande avancée, mais a regretté qu'il ne s'adresse qu'à peu de patients. Le pembrolizumab ajouté à la chimiothérapie a presque doublé les chances d’avoir une réponse et a réduit le risque de progression ou décès de presque 50 %, avec un traitement tolérable. Commentant les résultats, le Pr Jean-Charles Soria a estimé que « la guérison était au coin ». Pour sa part, le Pr Julien Mazières (CHU Toulouse) évoque « un tremblement de terre ». Pour autant, ce « séisme » ne bénéficie qu’aux patients répondeurs à ces thérapies très ciblées. Encore faut-il, selon ces spécialistes, que les prises en charge soient bien organisées. C’est-à-dire il faut « bien utiliser les informations et les traitements », a ajouté Jean-Charles Soria dans une des principales communications du congrès européen. D’autant que les cancers du poumon se détectent trop tard. La prévention systématique n’existe pas, comme dans le cancer du côlon et du sein. Il y a encore du « pain sur la planche ».
Lancet Oncology, en ligne depuis le 9 octobre.
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