Loin des débats convenus sur la différence entre conflits et liens d’intérêts, la conférence inaugurale du sociologue Patrick Castel* lors de la dernière édition des RCFR a inscrit la question de l’expertise dans le temps long. La première occurrence en français est ainsi retrouvée dans un poème de Ronsard. Au XVIe siècle, la navigation, les travaux publics et les questions militaires monopolisent le champ de l’expertise. Le savoir médical n’a guère progressé après Galien. Depuis, le pouvoir médical n’a cessé d’avancer. Et s’impose dans la sphère politique. Enjeu majeur, lorsque l’on est expert, on est peu substituable. Certes, il n’y a pas d’automaticité entre décision politique et expertise. Mais la parole de l’expert pendant longtemps n’a pas été discutée. On note toutefois une différence lorsqu’un énoncé est prononcé dans une réunion scientifique ou lorsqu’il s’agit d’une expertise. Pour un même contenu, la valeur dépend donc de l’endroit où il est exprimé. Faut-il souligner que l’expertise est surtout relationnelle ? On lui demande de se prononcer quelle que soit la limite des connaissances à laquelle l’expert peut être confronté. Exemple, la métaanalyse des essais randomisés s’avère extrêmement complexe. Parfois, des experts optent pour ne pas recommander des données probantes pour des raisons pratiques comme la difficulté de réalisation d’un acte. Dans ce cas, la généralisation d’un acte peut présenter des risques. La compétence d’un expert n’est donc pas seulement livresque et scientifique. Elle consiste aussi à bien cerner la demande.
Aujourd’hui, l’une principales évolutions est le passage d’un monde d’experts dominé par les professions légitimes à une expertise le plus souvent collective. Elle ne se réduit pas à une activité seulement scientifique mais aussi politique. L’expertise chimiquement pure n’existe pas.
* Chargé de recherche Fédération nationale des sciences politiques au Centre de sociologie des organisations
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