Après plusieurs études négatives, l’étude Reduce IT démontre enfin un bénéfice cardiovasculaire (CV) des acides gras à longue chaîne oméga-3 en prévention primaire comme secondaire. Dans cet essai, l’ingestion d’acide eicosapentaénoïque – EPA – à fortes doses (ici, 2 g x 2/j) a permis de réduire de 25 % en cinq ans le risque d’événements CV majeurs et de 28 % celui d’AVC chez des patients à haut risque CV déjà traités par statine et bien contrôlés. Au vu de ces résultats, « il semble donc possible, chez les patients avec un bilan lipidique “semi-normal” (triglycéridémie à jeun entre 1,50 et 5 g/L et LDL-C entre 0,4 et 1 g/L), d’améliorer le pronostic au moyen de fortes doses d’EPA ajoutées aux statines », estime le Dr François Diévart, cardiologue (Dunkerque). Trois études en cours testent la reproductibilité de ces données, et les premiers résultats sont attendus fin 2019.
Reste que pour le moment, cette forme pure d’EPA est uniquement disponible aux États-Unis. Elle est attendue en France d’ici à deux ans. En attendant, il faut se garder d’extrapoler ces résultats aux préparations d’oméga-3 commercialisées aujourd’hui en France, « toutes les études menées en prévention primaire avec un mélange EPA/DHA à doses faibles ou moyennes ayant été négatives ». L’étude Vital, également présentée pendant le congrès, était d’ailleurs elle aussi négative, une faible dose (<1 g/j) ne modifiant ni le risque d’événements CV majeurs ni celui de cancer en prévention primaire.
Plusieurs études dans l’insuffisance cardiaque
Autre étude “vedette” à Chicago, l’essai Declare-Timi 58, qui conforte l’intérêt CV des nouveaux antidiabétiques inhibiteurs du SGLT-2 (SGLT-2i). Après la découverte des effets cardioprotecteurs de l'empagliflozine et de la canagliflozine, ce travail montre que la dapagliflozine est neutre en matière de risque d’infarctus et d’AVC mais réduit le risque d’hospitalisation pour insuffisance cardiaque (IC) de près de 27 %. « Ce résultat est pour la première fois observé à la fois en prévention primaire et secondaire », souligne le Dr Diévart, pour qui les SGLT-2i pourraient être particulièrement bénéfiques chez les diabétiques à risque d’IC, comme ceux hypertendus par exemple. À ce jour, aucune molécule de la classe des SGLT-2i n’est disponible en France, mais ces nouvelles données pourraient faire bouger les choses.
Toujours dans l’IC, l’étude Tred HF montre que dans cette pathologie chronique, le traitement doit être maintenu même après disparition des symptômes. Dans cet essai, l’arrêt des médicaments chez des patients devenus asymptomatiques sous traitement (FEVG > 50 %, NT-pro-BNP < 250 ng/L) aboutissait dès six mois à la réapparition de signes évolutifs chez 44 % des patients. « Il ne faut donc pas les stopper. »
Hypercholestérolémie : les Américains mettent un peu d’eau dans leur vin
Le congrès de l'AHA a aussi été l'occasion de présenter les nouvelles recommandations américaines sur l’hypercholestérolémie. La version 2013 avait suscité le débat en prônant une diminution relative du LDL en fonction du risque (selon un calculateur du risque à 10 ans), indépendamment du taux de LDL initial, au moyen de l’utilisation exclusive de statines. « Ces recommandations ne pouvaient qu’être modifiées du fait de la démonstration du bénéfice clinique de deux autres classes thérapeutiques, l’ézétimibe en 2015 et les antiPCSK-9 en 2017 et 2018 », explique le Dr Diévart. Dans la nouvelle feuille de route, il devient donc possible d’associer ces traitements aux statines. Le principe reste de proposer une statine à forte dose en cas de risque CV élevé, mais si le LDL-c demeure au-dessus de 0,70 g/l avec la dose maximale tolérée, il est conseillé d’ajouter l’ézétimibe. En prévention secondaire, chez les patients à risque très élevé (IDM récent, antécédents de 2 IDM, artérite associée…) ou en cas d’hypercholestérolémie primaire sévère, on peut aussi ajouter un anti-PCSK-9 pour atteindre l’objectif.
Zone grise Par ailleurs, en prévention primaire, l’évaluation du risque pour la prescription éventuelle d’une statine demeure identique à la version 2013, à la différence près qu’en cas de risque intermédiaire selon le calculateur de risque (entre 7,5 % et 20 %), les experts accordent désormais une place à la discussion. Dans cette zone grise, la prescription d’une statine dépendra alors de la présence d’une dizaine de facteurs aggravants (syndrome métabolique, insuffisance rénale, maladie inflammatoire chronique, ménopause précoce, etc.).
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