En novembre 2024, le projet scientifique collaboratif ComPaRe (pour Communauté de patients pour la recherche), lancé par l’Assistance publique -Hôpitaux de Paris (AP-HP), a fêté le cinquième anniversaire de sa cohorte. Depuis son commencement, la e-cohorte a inclus 58 000 patients et généré 95 projets de recherche dont 20 cohortes, deux essais cliniques et la publication de 35 articles scientifiques. Et une toute nouvelle cohorte Malformations artérioveineuses cérébrales (MAVC) a officiellement été lancée début décembre 2024.
À travers quelque 3 600 idées de patients pour améliorer le système de santé, l’hôpital et les consultations, ComPaRe est une opportunité pour explorer de nouveaux concepts parfois mal connus dans la littérature, tel que le fardeau du traitement. « Par exemple, si une personne avec un diabète de type 2 effectue la totalité de ce qui est indiqué dans les recommandations, elle passerait deux heures par jour à s’occuper de sa maladie », explique le Pr Viet-Thi Tran, co-investigateur de ComPaRe. Et d’ajouter : « Il est nécessaire de savoir à quel moment ce fardeau devient inacceptable ».
Impliquer les patients en recherche permet d’améliorer la prise en charge, de mieux comprendre les parcours et les trajectoires de soins.
Si une personne DT2 effectue la totalité des recommandations, elle passerait deux heures par jour à s’occuper de sa maladie
Pr Viet-Thi Tran, co-investigateur de ComPaRe
Plusieurs résultats de cohortes démontrent une dissonance entre les critères des médecins et ceux des patients pour juger de l’efficacité d’un traitement dans un essai clinique. Par exemple, dans la neurofibromatose, plutôt que la taille et le volume des neurofibromes ou la surface couverte, les patients veulent évaluer les répercussions d’un traitement sur la vie quotidienne, la stigmatisation, ou encore la tolérabilité.
Il en va de même pour le vitiligo. Dans le cadre d’une cohorte, un questionnaire de stigmatisation des pathologies dermatologiques a été développé pour montrer la sévérité perçue par les patients.
Endométriose : sept profils de comorbidités
L’épidémiologiste Marina Kvaskoff, membre de l’Inserm et responsable scientifique de ComPaRe, a présenté les dernières avancées de la cohorte Endométriose, composée de 7 700 patientes actives. Une étude a révélé sept grands profils de comorbidités : sans comorbidités ; douleurs chroniques, fibromyalgie, syndrome de l’intestin irritable ; dépression et anxiété ; maladies allergiques et atopiques ; kystes ovariens (dont syndrome des ovaires polykystiques [SOPK] et endométriome) ; troubles de la thyroïde ; migraines. Une seconde a mis en évidence trois trajectoires pour les douleurs : sévères constantes (liées à des antécédents familiaux de douleurs pelviennes et un nombre de pathologies plus élevées), peu intenses et en aggravation ou en amélioration (corrélées à un âge précoce de début des symptômes).
Plusieurs travaux de recherche sont en cours ou en préparation pour combler les manques de la littérature scientifique : facteurs d’évolution des symptômes douloureux, effet des polluants organiques persistants sur la sévérité de la maladie, déterminants du recours aux thérapies alternatives, profils de traitement et santé reproductive, pour n’en citer que quelques-uns.
En lien avec la Cnam, une étude sera menée sur les profils de patientes qui demandent et obtiennent une affection de longue durée (ALD), une allocation aux adultes handicapés (AAH) et/ou la reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé (RQTH). Une enquête se monte sur les dépenses de soins et le reste à charge. De nouvelles cohortes en santé gynécologique sont prévues, notamment sur les fibromes et le SOPK.
L’importance du choix des mots
Dans la cohorte Dépression, deux études ont été communiquées en 2024, l’une sur l’annonce diagnostique (Disclose), l’autre sur le handicap psychique associé. Les résultats de Disclose ont été dévoilés par la Dr Astrid Chevance, psychiatre et responsable scientifique de la cohorte. Ce qui ressort des suggestions de patients est le besoin de préparer progressivement au diagnostic d’une maladie qui fait encore l’objet de stigmatisation. Il est proposé aux médecins d’utiliser des termes médicaux adaptés à l’état émotionnel du patient, voire des termes non médicaux dans un premier temps face à une personne en difficulté avec le terme « dépression ».
Il faut préparer progressivement au diagnostic de la dépression
Les personnes interrogées appellent aussi à informer sur les prises en charge disponibles dès l’annonce du diagnostic mais de ne proposer un traitement médicamenteux que lors d’une seconde consultation. Il faut ainsi « tâter le terrain » pour accompagner de la manière la plus adaptée. Une nouvelle cohorte a été lancée en avril 2024 sur les pratiques addictives, avec l’objectif d’en avoir pour tous les troubles psychiques.
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