« Les études de l’Ademe dans les milieux solides, comme les sols ou les matières organiques fertilisantes, montrent une contamination quasi systématique par les microplastiques », nous apprend l’Ademe, l’Agence de la transition écologique, le 26 décembre 2024. Dans deux rapports qu’elle publie, l’Agence montre non seulement que plus des trois quarts des sols français de métropole sont contaminés par des microplastiques (MP), fragments entre 1 µm et 5 mm, et que cela concerne aussi massivement les produits résiduaires organiques utilisés comme fertilisants. « La préservation et la restauration de la santé des sols constituent un axe majeur pour faire face aux enjeux climatiques et de préservation de la biodiversité », explique l’Ademe dans un communiqué de presse transmis au Quotidien. Il est donc « impératif d’approfondir nos connaissances sur la contamination de l’environnement par de nouveaux polluants, tels que les microplastiques […] afin de mettre en place un plan d’action efficace », complète Isabelle Deportes, ingénieure à l’Ademe.
Outre les potentielles atteintes sur l’environnement, et ses conséquences, les MP interagiraient également avec la santé humaine puisqu’il a été montré ces dernières années que des particules pouvaient être retrouvés dans les poumons, le sang, le foie, les plaques d’athérome, le placenta ou encore le système urinaire… avec, dans certains cas, des risques attestés sur la santé. Cependant, les rapports de l’Ademe ne se sont pas attachés à évaluer les conséquences toxicologiques ou écotoxicologiques associées à cette contamination.
Plus de 70 % des particules retrouvées ne respectent pas les normes granulométriques
C’est par le projet Microsof que l’Ademe a souhaité établir les premières références nationales sur la contamination des sols français par les MP. Mené par l’Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l’environnement (Inrae) et l’Institut de recherche Dupuy De Lôme, Microsof a analysé les échantillons de 33 sols français métropolitains, dont 21 provenaient de sols de grandes cultures, quatre de prairies, quatre de vignes et vergers, et quatre de forêts. Sur ces échantillons, 76 % étaient contaminés par des MP appartement majoritairement à la famille des polyéthylènes (PE), la matière plastique la plus commune. De plus, 70 % des MP mesuraient moins de 2 mm, échappant ainsi à la future réglementation sur les matières fertilisantes et supports de culture qui impose une granulométrie supérieure à 2 mm. En moyenne, les scientifiques ont retrouvé 15 particules de MP par kilogramme de sol sec, dont la source ne pouvait pas être identifiée. Cependant, pour les échantillons provenant des sols agricoles, le rapport émet l’hypothèse de MP provenant des pratiques agricoles mises en œuvre.
Enfin, l’étude « Microplastiques présents dans les produits résiduaires organiques » a recherché la présence de MP dans les produits résiduaires organiques (PRO) utilisés pour fertiliser les sols. Les scientifiques ont ainsi procédé à l’analyse de 21 familles de matières organiques fertilisantes : boues de stations d’épuration, déchets verts, divers composts dont ceux issus de tri mécano-biologique (TMB) des ordures ménagères résiduelles, digestats et effluents d’élevage et agricole. En effet, la contamination des PRO par les MP peut engendrer celle des sols puis des eaux. Ainsi, sur 167 échantillons analysés, 166 comprenaient des MP majoritairement de la famille des polymères, la matière utilisée pour les emballages. Les déchets traités par tri mécano-biologique étaient les plus contaminés avec, en moyenne, 60 000 particules par kilo de sol sec. Ici, 75 % des MP avaient une taille inférieure à 1 mm. En conséquence, les scientifiques estiment entre un million et un milliard de particules par hectare la quantité de particules apportées aux sols agricoles par les épandages de produits résiduaires organiques.
Une étude précédente, Biomaleg, avait d’ailleurs montré que le film de paillage - une bâche permettant de réguler humidité et chaleur ainsi que la pousse des mauvaises herbes - était à l'origine de la pollution des sols agricoles.
Des conséquences encore incertaines
Face à ces résultats, l’Ademe adresse plusieurs recommandations pour lutter contre la contamination par les MP, afin de préserver la santé des sols. L’Agence recommande tout d’abord de limiter l’utilisation des plastiques, notamment dans les emballages, et d’améliorer la collecte séparée et le tri des biodéchets. Elle insiste aussi sur le respect des bonnes pratiques en matière d’équipement de déconditionnement et d’identification des solutions innovantes pour diminuer, voire éliminer, les MP. Elle rappelle enfin le cadre réglementaire concernant l’épandage et l’utilisation de paillages agricoles biodégradables.
Les auteurs du rapport indiquent élargir leur analyse à plus d’échantillons de sols français, notamment urbains et provenant d’Outre-Mer afin de confirmer ces observations. De plus, une meilleure connaissance de la composition chimique des plastiques et de leurs additifs semble essentielle. « Ces recommandations rejoignent les connaissances scientifiques déjà abouties sur les milieux aquatiques notamment. Toutefois, la mesure des impacts pour la santé humaine et pour la santé de l’environnement de la contamination terrestre est en cours d’acquisition », conclut Isabelle Deportes.
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