« Le glyphosate est moins cancérogène que la charcuterie ou la viande rouge qui ne sont pas interdites. » La saillie du sénateur UDI de Haute-Garonne Pierre Médevielle, vice-président de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST), dans les colonnes de « la Dépêche du Midi » a provoqué la désapprobation immédiate de ses pairs ainsi que des défenseurs de l'environnement.
Dans cet entretien, le sénateur, pharmacien de profession, membre du groupe d'étude Agriculture et alimentation, prétend dévoiler en avant-première les conclusions du rapport d'information sur « l'indépendance et l'objectivité des agences chargées d'évaluer la dangerosité des substances mises sur le marché » – l'ECHA, l'EFSA, ou l'ANSES* – que l'OPECST présentera à la presse ce 16 mai. Il y affirme notamment que « si le glyphosate a certainement beaucoup de défauts, aucune étude scientifique ne prouve formellement sa cancérogénicité ni en France, ni en Europe, ni dans le monde ».
Fond et forme condamnables, selon Cédric Villani
« Sur la forme, il s'exprime avant la conférence de presse officielle et, sur le fond, il a parlé de certains éléments du rapport, mais y a ajouté son opinion et ses conclusions propres qui ne sont pas celles qui engagent l'Office », a regretté ce 16 mai au micro de France Info le premier vice-président de l'OPECST Cédric Villani, député LREM.
« Ce rapport rappelle ce qu'il y a dans la controverse sur le glyphosate, mais ne tire pas de conclusions sur le fond. Ce qui intéresse le rapport, c'est comment améliorer la communication, la transparence des processus, sa fiabilité ; bref, comment faire en sorte que les agences en France et en Europe soient au mieux au service de la société », précise le lauréat de la médaille Fields.
C'est un « buzz inutile », a cinglé la députée Anne Genetet, co-auteure du rapport.
Le document « ne se prononce pas sur la toxicité à long terme du glyphosate (...). Si la question du glyphosate est abordée dans le rapport, c’est pour mettre en perspective les différences d’appréciations entre le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC) et les agences d’évaluation, notamment l’EFSA, afin d’éclairer le public sur le contenu et la portée de ces divergences apparentes entre experts », lit-on dans un communiqué signé du président de l'OPECST Gérard Longuet et de Cédric Villani. Et de rappeler « qu'il n'appartient pas à l’OPECST de formuler une vérité scientifique officielle ou de procéder par lui‑même à des travaux de recherche ».
L'association de défense de l'environnement Générations futures a dénoncé de son côté des « déclarations ahurissantes » d'un sénateur « très sensible aux arguments de la FNSEA », et qui reprennent « le vieil argument utilisé par l'industrie selon lequel le glyphosate serait moins cancérogène que la viande ».
Pour rappel, le Centre international de recherche sur le cancer (CIRC), agence de l'OMS, a classé le glyphosate comme cancérogène probable chez l'homme en 2015. Quelques mois plus tard, l'EFSA estimait que le glyphosate n'était probablement pas cancérogène, avis repris par l'ECHA en 2017 dans un travail dont la méthodologie a suscité de multiples critiques. Si l'Europe a voté le renouvellement de l'autorisation du glyphosate pour cinq ans, Emmanuel Macron s'est engagé à l'interdire sur le sol Français d'ici au 1er juillet 2021.
Sur le plan judiciaire, le groupe Monsanto a été jugé responsable d'un cancer à deux reprises, aux États-Unis. En France, le Parquet de Paris vient d'ouvrir une enquête préliminaire à la suite de la plainte déposée par « le Monde » pour avoir fait établir fin 2016, un fichier recensant les cibles d'influence du glyphosate.
* Respectivement Agence européenne des produits chimiques, Autorité européenne de sécurité des aliments, et Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation.
Titre modifié le mardi 14 mai
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