L’Autorité de la concurrence a révélé ce jeudi les résultats d’une enquête sectorielle sur le médicament. Elle se prononce pour la vente (sous contrôle) des spécialités sans ordonnance en dehors des pharmacies. Elle publie aussi une décision imposant une amende de 15,3 millions d’euros au laboratoire Schering-Plough pour avoir entravé l’arrivée du générique du Subutex.
• Le monopole officinal écorné ?
Les médicaments d’automédication et certains produits « frontières » (comme les tests de grossesse et produits d’entretien pour lentilles de contact) vont-ils se retrouver en grande surface ? L’Autorité de la concurrence y est favorable, sous conditions. Dans un avis rendu public ce jeudi, l’institution juge que la concurrence ne joue que faiblement en matière de médicaments non remboursables « comme en témoignent les très forts écarts de prix (de 1 à 4) relevés ».
L’institution juge cette situation « défavorable au consommateur » et se prononce pour la vente des médicaments d’automédication en parapharmacies ou en grande surface. Elle se dit « convaincue, notamment au regard des exemples étrangers », que cette disposition offrirait des avantages aux consommateurs, sans nuire à la qualité de la dispensation. Selon elle, cette ouverture permettrait une baisse des prix de 11,4 à 16,3 %.
L’autorité souhaite cependant encadrer ces pratiques, en imposant à ces nouveaux lieux de dispensation la présence d’un pharmacien diplômé, et la création d’un espace de vente dédié et d’un point d’encaissement distinct. Ils devraient aussi s’engager à ne pas faire de ces médicaments des produits d’appel.
« Nous pensons que le statu quo ne peut être maintenu », a résumé Bruno Lasserre, président de l’Autorité de la concurrence, tout en assurant qu’il n’était pas question pour lui « d’aller plus loin » que cette ouverture limitée. Les avis de cette Autorité sont consultatifs et ne s’imposent pas aux pouvoirs publics.
À peine cet avis connu, Marisol Touraine a fait savoir ce jeudi qu’elle était opposée à la vente de médicaments en grandes surfaces, réaffirmant son attachement au monopole officinal sur les médicaments.
Elle a par ailleurs missionné l’IGAS sur le sujet de la distribution en gros des médicaments.
• Une amende de 15,3 millions d’euros pour Schering-Plough
« Certains laboratoires mettent en place des stratégies délibérées pour faire obstacle au développement des génériques », a souligné ce jeudi Bruno Lasserre. Visé cette fois, le laboratoire Schering-Plough, qui commercialise le Subutex. L’enquête de l’Autorité a mis en évidence, notamment au moyen de perquisitions, la mise en place d’une « stratégie anti concurrentielle » pour entraver l’arrivée sur le marché d’un générique du Subutex, lancé par Arrow Génériques en 2006.
Selon l’Autorité de la concurrence, cette stratégie a pris la forme d’un « dénigrement » du générique d’Arrow, notamment en insistant sur ses risques de mésusage et en saturant les linéaires des officinaux avec le princeps par le biais de remises. Selon Bruno Lasserre, de nombreux témoignages d’officinaux confirment qu’il « ne s’agissait pas de dérapages locaux, mais d’une campagne délibérée ».
Le montant de l’amende de 15,3 millions d’euros tient compte du fait que Schering-Plough « a choisi de ne pas contester nos griefs », et qu’il s’est engagé à ne pas rééditer ces pratiques, commente Bruno Lasserre.
En mai déjà, l’Autorité avait condamné le numéro un français Sanofi à une amende de 40 millions d’euros dans une affaire similaire qui concernait son médicament vedette, le Plavix.
• Paracétamol, Doliprane et génériques : satisfaction de l’Autorité
Au-delà de ces deux affaires, l’Autorité de la concurrence s’est félicitée de décisions récentes qui vont dans le sens de ses recommandations, comme la « générication » programmée du Doliprane, le médicament le plus prescrit et vendu (en volume). L’Autorité s’était émue de cette absence du Paracétamol au répertoire des génériques, dans un précédent avis de juillet dernier. L’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) a entamé procédure qui devrait aboutir à l’inscription du paracétamol au répertoire.
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