On aura remarqué que l'ancien Premier ministre n'a pas vraiment changé son système de défense. Il a certes reconnu que les pratiques parlementaires de naguère « acceptables sinon acceptées » devaient cesser, au point qu'il s'est personnellement engagé à les réformer s'il est élu président. Mais il est resté sur sa position du début : de tels comportements ne sont pas illégaux, les sommes reçues par Mme Fillon étaient raisonnables et ne semblent considérables que si elles sont additionnées au terme de quelque quinze ans, elle a beaucoup travaillé, elle était suffisamment diplômée pour tenir ce rôle et être rémunérée, et il est convaincu qu'une cabale a été montée contre lui. Ces accusations contre le pouvoir, la presse et la justice ont déjà été rejetées par le parquet national financier, qui poursuit son enquête, réservant peut-être à M. Fillon une très mauvaise surprise. Elle risque de compromettre sa candidature à un stade plus évolué de la campagne. Ce danger explique d'ailleurs qu'une partie de la droite ait souhaité le retrait de l'ancien Premier ministre.
Avant de s'expliquer devant l'opinion publique, et pour s'y résoudre, il s'est fait violence, en reconnaissant que, pendant ses dix jours de tergiversations, il était déstabilisé, M. Fillon a fait savoir à son camp qu'il ne se retirerait pas de la course présidentielle. Ce qui ferme la porte à l'option Juppé et met fin aux ambitions opportunistes de quelques-uns de ses amis ou de ses adversaires. Il s'est donc rendu à la conférence de presse avec la ferme intention d'offrir de lui une image moins rigide, plus sensible que celle que l'on connaît, ce qui lui sera sûrement profitable, mais aussi de claironner qu'il est le patron. Tout à coup, on est passé du fait-divers politique à la repolitisation du problème. Premièrement, il n'y a pas de plan B, parce qu'un plan B, c'est le chaos. Deuxièmement, il est, lui, Fillon, le candidat de la droite et du centre élu par la primaire et personne ne peut lui contester cette légitimité, personne ne peut le remplacer. Troisièmement, il est l'homme providentiel qui apparaît dans une crise historique et sur lequel le peuple français peut compter.
Un programme de rupture
Dès lors qu'il livrait cette analyse, il s'adressait en homme politique à des journalistes politiques qui, quoi qu'ils pensent de l'affaire, n'ignorent rien de l'importance de l'enjeu. Une large fraction du peuple français se passerait bien de la droite et on trouve des gens dans toutes les sphères de l'activité humaine pour se réjouir de la chute de M. Fillon, laquelle ne doit pas être exclue tant qu'il n'est pas assuré de ne pas être mis en examen. Mais l'analyse, elle, est vraie. Pour au moins deux raisons : la première est dictée par le processus démocratique qui, s'il était privé d'une des deux jambes sur lesquelles il marche, serait invalide et perdrait toute crédibilité. La seconde est beaucoup plus conjoncturelle, mais pas moins importante : la gauche classique a fait l'objet d'une OPA par les frondeurs et présente donc un programme aventureux. Elle est combattue par une extrême gauche qui nous propose encore pire. De l'autre côté du spectre politique, le Front national, devenu le premier parti de France, envisage la fin de tous les principes qui nous ont guidés jusqu'à présent et la plate-forme économique la plus absurde que l'on ait conçue.
Dans cette configuration que le populisme a rendue possible, M. Fillon est porteur d'un « programme de rupture » qui satisfait deux exigences : celle d'un changement profond de notre système économique et social qui n'a que trop tardé, et celle qui réclame des mesures rationnelles au sein desquelles aucun des nombreux écueils qui nous guettent ne sera sous-estimé. M. Fillon tirait sa réputation de sa rigueur programmatique. Il s'en tient à elle, en minimisant autant qu'il le peut l'affreuse mésaventure qu'il a vécue et risque de vivre encore. Les Français ont le choix : ou bien ils croient dur comme fer à la probité vêtue de lin blanc et ils rejettent M. Fillon, ou bien ils veulent un avenir décent et sont tentés de voter pour lui.
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