20 ans après, un mea culpa appuyé en direction des médecins libéraux : invité à s’exprimer dans le cadre des « Rencontres de La Baule » organisées par la conférence nationale des « URPS-médecins libéraux », l’ancien Premier ministre Alain Juppé, qui s’était attiré les foudres de la profession lors de sa réforme au pas de charge de l’Assurance-maladie en 1995, a tenté, avec succès, d’arrondir les angles, de s’expliquer et de reconnaître ses erreurs.
« Entre la médecine libérale et moi, ça n’a pas toujours été un long fleuve tranquille », admet le candidat à la primaire de la droite et du centre pour la prochaine élection présidentielle de 2017. « J’ai tiré les leçons de la réforme que j’ai faite en 95, poursuit-il devant 200 médecins libéraux qui l’attendent au tournant. Nous sortions d’une sévère récession, les comptes étaient dans le rouge, c’était le signal de la fragilisation de notre modèle social. »
« Je porte une lourde part de responsabilité »
L’ex-Premier ministre justifie son action. « Dans l’urgence, j’ai dû prendre des mesures conjoncturelles très fortes, je voulais rétablir l’équilibre dès 1997 ». Devant les médecins étonnés, Alain Juppé se livre ensuite à un véritable mea culpa. « Avec le recul, je regrette qu’on ne se soit pas compris, mais dans cette incompréhension, je porte une lourde part de responsabilité ». Dans la salle, certains médecins sourient, d’autres tentent quelques timides applaudissements.
Alain Juppé poursuit sa confession. « Je n’ai pas su vous convaincre que cette réforme était le premier étage d’une réforme de l’Assurance-maladie. Les sanctions collectives pour les médecins libéraux ne pouvaient que donner un sentiment d’incompréhension et d’injustice. » De fait, le plan Juppé a laissé un souvenir cuisant à la profession.
« Je ne recommencerai pas »
En habile communicant, Alain Juppé maîtrise ses effets, allant crescendo jusqu’au bouquet final de ses excuses. « Je reconnais que je ne vous ai pas suffisamment parlé ni écouté, je ne recommencerai pas ! » Une moitié de la salle rit cette fois de bon cœur, l’autre applaudit. L’opération de communication est un succès.
Après sa repentance, Alain Juppé lance quelques piques à Marisol Touraine au sujet de son projet de loi de santé. « Certains veulent sacrifier la médecine libérale. Le tiers payant généralisé en est un exemple que vous avez raison de combattre ! La ministre de la Santé ne vous écoute pas plus que moi en 1995, vous voyez comme je suis humble... » Franc succès dans la salle.
L’ancien Premier ministre fait même une petite sortie sur la valeur du « C » : « Le maintenir à son tarif actuel est un signal négatif », lance-t-il sans se hasarder à chiffrer sa réévaluation éventuelle. La question de la nomenclature des actes est esquissée. « Le chantier est à refaire, insiste-t-il. Le coût de certains actes n’a pas évolué depuis des décennies. »
La confiance, une alchimie réciproque
Le maire de Bordeaux précise qu’en matière de démographie médicale, il n’est « pas favorable à la contrainte. Résoudre la question des déserts médicaux nécessitera une politique globale d’aménagement du territoire. Il faudra aussi valoriser les modes d’exercice collectifs ».
Une présidente d’URPS interroge Alain Juppé sur la recette qu’il compte appliquer pour regagner la confiance des médecins. « On ne fait rien sans confiance, répond-il. Le hic, c’est que ça ne se décrète pas, ça se crée. C’est une alchimie réciproque. »
Plus généralement, Alain Juppé annonce que son programme présidentiel, dont il n’a pas finalisé la rédaction, comprendra « une vingtaine de grands thèmes ». Parmi les sujets, l’âge de la retraite, qui devra être porté « au moins à 65 ans ». Sur la réforme fiscale, il n’est « pas favorable à la fusion de l’impôt sur le revenu et de la CSG, car ça serait essentiellement supporté par les classes moyennes ».
Au bout d’une heure de dialogue avec les médecins, Alain Juppé quitte la salle... sous des applaudissements nourris avant de rejoindre l’Université d’été des « Républicains », également à La Baule. Opération séduction réussie.
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