N’en déplaise à certains commentateurs du petit écran, le lobby médical n’est plus ce qu’il était. À preuve, l’irruption ces dernières années des infirmières en pratique avancée (IPA), malgré les réticences initiales des syndicats médicaux. Super infirmières ? Sous-médecins ? Selon que l’on y est favorable ou opposé, on considérera différemment ces IPA, qui sont un millier aujourd’hui, mais dont le nombre pourrait quintupler au cours du prochain quinquennat. Quoique très récent en France, ce métier est donc en plein essor. Et les problèmes démographiques du moment y sont bien sûr pour quelque chose : vieillissement de la population, qui s’accompagne d’une véritable pandémie de maladies chroniques ; pénurie de médecins, sensible depuis une quinzaine d’années mais qui affecte désormais la quasi-totalité des territoires.
Tout cela rendrait-il ce nouveau métier aussi indispensable que justifié ? Aux yeux des décideurs, il a en tout cas le mérite d’offrir une solution immédiate au grand défi du moment : former de nouveaux personnels de santé qualifiés en un temps record (deux années suffisant pour upgrader une infirmière). En la matière, on ne part pas tout à fait de rien. Ces dernières années, les expérimentations Asalee ont tracé le chemin d’un nouveau rôle infirmier. Des exemples étrangers, notamment anglais, ont ouvert la voie. Et la crise actuelle a amplifié le mouvement. Le modèle inquiète pourtant le corps médical. Il faut dire que les transferts de tâches de ces derniers mois ne sont pas pour rassurer les médecins qui ont dû partager certaines de leurs activités. Cela explique sans doute la mauvaise humeur de libéraux qui redoutent un contournement du parcours de soins, mais aussi — c'est plus nouveau — d'hospitaliers, qui craignent une baisse de la qualité des soins.
La préoccupation est d’autant plus forte que le corps médical pressent – à juste titre — une évolution irréversible, alors même que, dans 15 ans, la profession aura retrouvé des effectifs normaux… En face, Olivier Véran se montre enthousiaste et proactif. Mais pour faire décoller ce chantier sans dégâts collatéraux, ce gouvernement et surtout le suivant devront éviter de le conduire à marche forcée. À charge pour le prochain ministre de la Santé de réunir trois conditions pour que chacun soit à sa place. D’abord, un salaire décent pour les principales intéressées, la grille actuelle paraissant une aumône pour des bac + 5. Il ne faudra pas non plus oublier les praticiens, donc penser à valoriser les tâches complexes sur lesquelles va se concentrer une part croissante de leur activité. Enfin, il faut le dire et le répéter : la concertation est indispensable entre pouvoirs publics et professionnels concernés. C’est moyennnant des protocoles négociés que les IPA seront perçues non comme des concurrentes, mais comme des partenaires par le corps médical.
Exergue : Pour faire décoller ce chantier sans dégâts collatéraux, ce gouvernement et le suivant devront éviter de le conduire à marche forcée.
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