Explications du Pr Katlama de la Pitié-Salpêtrière

Les enjeux du vaccin thérapeutique dans l’infection VIH

Publié le 04/12/2012
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Crédit photo : Phanie

UN VACCIN thérapeutique est en bonne voie dans l’infection par le VIH. La société française InnaVirVax, située au Génopole d’Évry vient d’annoncer le bon profil de tolérance du vaccin VAC-3S observé au cours d’un essai de phase I/IIa chez 24 sujets séropositifs. Si ces résultats sont encourageants, ils n’en restent pas moins préliminaires. « Le vaccin est bien toléré avec une administration en 3 injections, explique le Pr Christine Katlama (Pitié-Salpêtrière), investigateur principal. L’objectif principal de cet essai était de montrer que le vaccin est admistrable à l’homme, c’est chose faite. Il reste maintenant à vérifier l’efficacité du vaccin, c’est-à-dire que notre hypothèse de recherche est bonne ».

3 groupes, 3 doses, 3 injections.

Vingt-quatre patients séropositifs « qui vont bien », dont le taux de CD4 est› 200/mm3 et sous traitement antirétroviral efficace, ont accepté de tester la tolérance du vaccin dans cet essai de phase I/IIa. L’étude a été menée en double aveugle dans deux centres de référence parisiens, la Pitié-Salpêtrière et Cochin. Trois groupes de 8 patients ont été constitués, dont 6 patients recevant le vaccin et 2 le placebo. Les trois dosages testés étaient de 0,1, 1 ou 10 µg. Trois doses étaient administrées dans chaque groupe à 4 semaines d’intervalle.

Missile-antimissile

L’approchede rechercheest originale, puisque le vaccin n’agit pas directement sur le VIH. « Ce n’est pas un vaccin dirigé contre le virus, insiste le Pr Katlama. Les effets sont indirects, puisque VAC-3S vise à préserver les défenses immunitaires ». Les chercheurs sont partis du constat fait dans de grandes cohortes de patients séropositifs. Alors qu’un taux élevé d’anticorps 3S est associé à une baisse moins rapide des CD4, le taux d’Ac anti-3S finit par baisser au fil du temps. « Le virus serait capable d’induire la mort des CD4 sans les infecter via la sécrétion d’une " toxine missile ", poursuit-elle. Les Ac anti3S pourraient être des " anti-missiles ". L’idée du vaccin est de faire en sorte que le virus soit " tenu en laisse ". Il faut bien comprendre que ces anticorps ne sont pas dirigés contre le virus, mais contre un effet nocif du virus. »

Les chercheurs réfléchissent maintenant à la manière dont monter le prochain essai pour évaluer l’efficacité du vaccin. « Des doses supérieures pourraient être testées, suggère le Pr Katlama. Mais la question principale reste bien celle de la définition des populations cibles. » Dans l’hypothèse optimiste où l’effet protecteur immunitaire se confirmerait, le vaccin ne se concevrait de toute façon qu’en complément du traitement conventionnel. « D’autres pistes importantes de recherche sont également en cours, par exemple nous travaillons beaucoup sur les réservoirs viraux dans le service. »

Dr IRÈNE DROGOU

Source : Le Quotidien du Médecin: 9200