Quel budget ? Quelles pathologies? Quel type de paiement ? Le cabinet de conseil Proxicare, spécialisé dans l'innovation en santé, a passé au crible 84 expérimentations autorisées de financements — chacune introduisant une rémunération innovante ou dérogatoire (forfait global, intéressement à la qualité, épisode de soins, etc.).
Grâce à l'analyse des cahiers des charges se dessine un éventail de ces nouvelles rémunérations « substitutives ou complémentaires » au paiement à l'acte, portées notamment à travers l'article 51 du budget de la Sécu 2018 (sur l'innovation en santé) ou les programmes ETAPES (télémédecine, télésurveillance). À l'heure où se développe une médecine de parcours, plus adaptée aux maladies chroniques, « les résultats de cet observatoire sont cohérents avec l'ambition des pouvoirs publics de développer des rémunérations mixtes pour assurer une bonne prise en charge de chaque personne », analyse Véronique Lacam-Denoël, fondatrice du cabinet. Une montée en puissance des paiements combinés qui avait été réclamée en 2019 par le rapport Aubert sur la réforme des modes de financement.
Dix projets, 200 millions
La dynamique des financements innovants est certes naissante. Quelque « 200 000 patients » seront embarqués dans ces premiers dispositifs d'ici à 2024. Les quatre régions abritant le plus d'initiatives sont l'Occitanie (34), l'Île-de-France (31), AURA et les Pays de la Loire (29 chacune).
Mais déjà, l'enveloppe dévolue au financement des soins (rémunération de la prise en charge) atteint quatre millions d'euros en moyenne ; surtout, les dix projets innovants les plus dotés représentent 60 % des fonds engagés, soit plus de 200 millions d'euros (lire ci-dessous). On y retrouve les expérimentations ministérielles d'incitation à la prise en charge partagée (IPEP, où un groupement de professionnels volontaires définit des actions au service de leur patientèle), les financements intégrés à l'« épisode de soins » (EDS) pour les prothèses de hanche et de genou ou encore le paiement forfaitaire en équipe en ville (PEPS). Les crédits d'amorçage et d'ingénierie (embauche de personnel administratif) sont, en moyenne, d'un demi-million d'euros.
Psychologues et diététiciens
Toujours selon l'observatoire, 38 % des projets innovants financent de l'exercice coordonné ou de la coopération, oubliés des nomenclatures tarifaires : réunions de concertation pluridisciplinaire, rémunération d'un coordinateur autour de soignants ou gratification d'une équipe (via une enveloppe commune).
Dans plus de la moitié des cas, les expérimentations portent sur des pathologies chroniques (29 %) comme le cancer, le diabète ou l'insuffisance rénale, et sur des problématiques du vieillissement (23%) telles que la dépendance, la iatrogénie ou la dénutrition. 9 % des projets ciblent la santé mentale et 8 % ont trait à l'obésité. 31 % ne se concentrent pas sur une seule pathologie de manière spécifique.
Autre enseignement : plus de la moitié des dossiers intègrent un financement de prestations non prises en charge par le régime obligatoire. 28 projets prévoient le remboursement de consultations de psychologues, 20 dispositifs incluent des consultations de diététiciens, et 20 encore des interventions d'éducateurs en activité physique adaptée ou de travailleurs sociaux . « Des professionnels incontournables dans le parcours de soins de patients âgés ou chroniques », décrypte Véronique Lacam-Denoël. Enfin, 21 % des projets incluent un dispositif médical (télésurveillance, dispositif d'auto-mesure ou de dépistage).
Évaluation exigée
Les modes de rémunération innovants proposés au sein des expérimentations sont, dans 80 % des cas des forfaits par patient inclus dans un parcours de soins. Les forfaits « à la patientèle » (ou à la population) — avec un montant souvent composé d'une valeur socle modulée en fonction des caractéristiques d'une population comme l'âge ou le diabète — restent minoritaires (19 %).
Un projet innovant sur cinq engage un système d'intéressement, c'est-à-dire une prime à la qualité, à la sécurité ou à la performance. Là encore, ce bonus peut être accordé par patient (8 %) ou par population suivie (12 %), calculé selon l'atteinte d'objectifs sur un ensemble de patients (fréquence d'hospitalisations, observance, réduction de situations d'urgences, etc.). L'observatoire cite Domoplaies, dispositif de prise en charge des patients atteints de plaies chroniques et/ou complexes en Occitanie, qui associe médecins traitants et experts, avec rémunération modulée selon les résultats.
« Il faudra suivre de près les évaluations de ces projets, dont dépendront les décisions politiques et qui préfigureront les modèles de demain, analyse Véronique Lacam-Denoël. Certaines questions restent posées, comme l'articulation entre les financeurs – Assurance-maladie et complémentaires – ou la répartition de la rémunération au sein d'une équipe libérale. »
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