Le projet de loi « Croissance et pouvoir d’achat » sur la réforme des professions réglementées met hors de lui le monde de la pharmacie officinale, à quelques jours des arbitrages sur ce dossier.
Le texte en l’état écorne le monopole de dispensation en permettant la vente des médicaments à prescription facultative hors officines ; il autorise l’ouverture à des tiers du capital des SEL (sociétés d’exercice libéral) à hauteur de moins de 50 % ; enfin, il assouplit les conditions de regroupement des pharmacies.
Les grandes surfaces dans le collimateur
Mais les jeux ne sont pas faits. Alors que les professions libérales se mobilisent, Marisol Touraine a indiqué qu’elle était « défavorable » à la vente hors officines des médicaments à prescription obligatoire.
Catherine Lemorton, présidente socialiste de la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale (et pharmacienne de formation) a déjà signifié elle aussi son désaccord : « Une telle mesure, si elle devait être adoptée, juge-t-elle, mettrait à mal toute la politique menée visant à ce que les Français consomment moins de médicaments. Ce ne sont certainement pas les grandes surfaces qui permettront d’atteindre cet objectif ».
Bon usage
Les officinaux prennent l’affaire au sérieux. Le président l’Union des syndicats de pharmaciens d’officine (USPO), Gilles Bonnefond, dénonce « un projet de loi rédigé par la grande distribution pour la grande distribution, des gens qui n’ont aucune compétence en santé ».
Même tonalité du côté de l’Union nationale des pharmacies de France (UNPF). Michel Caillaud, son président (démissionnaire pour raisons personnelles) parle de projet « démagogique ». Il critique le « paradoxe » qui consiste à « prôner à la fois le bon usage du médicament et sa distribution en grande surface ». Et prend l’exemple du Paracétamol. Il assure qu’en un an en France, seuls six cas de surconsommation ont été enregistrés, contre 600 au Royaume-Uni où il est en vente en grande surface.
Philippe Gaertner (FSPF), dans un communiqué commun avec l’UNPF, dit partager « l’exaspération et l’angoisse légitimes des officinaux qui s’expriment par de nombreux appels à l’action ».
Gilles Bonnefond (USPO) met dans le même sac la fin du monopole de dispensation, l’ouverture du capital des SEL et l’assouplissement des conditions de regroupement des pharmacies. « L’ouverture du capital serait la pire des choses, juge-t-il. Si le pharmacien devient dépendant d’actionnaires extérieurs, il cessera d’être un professionnel de santé pour devenir un serviteur du capital. »
Blocage de la chaîne du médicament ?
La riposte à adopter divise encore. À l’USPO, Gilles Bonnefond prévient qu’une grève des gardes est déjà programmée à partir du 25 septembre. Une pétition va être adressée à la population sur le thème « La santé n’est pas un commerce, il faut que les médicaments restent en pharmacie ». « Si on ne nous écoute pas, nous pourrions entamer un mouvement plus sauvage avec le blocage de la chaîne du médicament », précise-t-il.
À l’UNPF, on met un bémol. « Nous ne sommes pas partisans de ce type d’actions, précise Michel Caillaud. On n’a pas le droit de prendre en otages les médicaments ni les prescriptions des médecins. » Tout juste confie-t-il que la riposte pourrait être « violente » et que des actions dans les gares pourraient être menées.
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