Le secteur de l'aide à domicile est-il le parent pauvre des mesures de distribution de protections face à l'épidémie de coronavirus ? Des élus locaux et des professionnels alertent sur le manque de masque de ces personnels pourtant indispensables en période de confinement, notamment pour les personnes âgées.
Initialement, le décret du 14 mars fixant les professionnels pouvant bénéficier d'une distribution gratuite de masques en officine n'incluait pas l'aide à la personne, s'étonne Philippe Naszályi, président du conseil territorial de santé (CTS) de l'Essonne. « On a encore beaucoup de mal à les considérer comme des professionnels de santé », s'agace-t-il. L'erreur n'a été corrigée que quelques jours plus tard, le 16 mars.
Malgré cela, « le nombre de masques par personne et par semaine est limité à neuf, cela ne suffit pas à couvrir l'ensemble de l'activité », poursuit le responsable qui dénonce également l'absence de test réalisé sur les auxiliaires de vie qui viennent en aide aux personnes âgées. « Ils ne figurent pas dans la liste des professionnels qui peuvent être testés », assure-t-il. Résultat ? « Les gens vont travailler la peur au ventre et les personnes âgées craignent d'être contaminées ! », explique Philippe Naszályi qui exige du gouvernement une « reconnaissance absolue » de ces métiers dans la lutte contre l'épidémie.
La digue de l'aide à domicile
Cette situation était déjà dénoncée par les professionnels du secteur, regroupés au sein de l'Union nationale de l'aide, des soins et des services aux domiciles (UNA). Dans un communiqué, l'association professionnelle alerte sur l'approvisionnement en protections des aides à domicile. « En dépit du décret du 16 mars, sur le terrain, ils sont encore considérés comme des acteurs secondaires et se voient refuser la délivrance des masques en officines », peut-on lire. « Jusqu’à présent, la digue de l’aide à domicile tient. Si elle se fissure, c’est un tsunami qui s’annonce. Personne ne veut vivre ça ! », prévient Laurence Jacquon, présidente de l’Union syndicale de branche de l’aide à domicile (USB Domicile).
« Les professionnels du domicile, on n'en parle pas », s'est quant à lui désolé le Dr Antoine Perrin de la Fédération des établissements hospitaliers et d’aide à la personne privés non lucratifs (FEHAP). « Ils ont besoin d'être reconnus et protégés. Ils n'ont pas suffisamment de matériel », a-t-il fait savoir sur Canal +.
« Les auxiliaires de domicile, du soin et de l'accompagnement, ont besoin d'être reconnus et protégés. Ils n'ont pas suffisamment de matériel. » @DG_Fehap #LInfoduVrai #coronavirus #confinement pic.twitter.com/WBOFQdA8j0
— L'Info Du Vrai (@linfoduvrai) March 30, 2020
Les élus s'inquiètent aussi
Plusieurs élus alertent aussi sur ce manque de reconnaissance. Le 18 mars, la présidente du conseil départemental de Lot-et-Garonne a adressé un courrier au ministre de la Santé allant dans ce sens. « Le président de la République a indiqué à plusieurs reprises que nous étions en guerre : nous ne pouvons gagner cette guerre sans le concours de tous et il est pour cela absolument indispensable que tous les soldats de première ligne soient dotés des armes nécessaires », écrit Sophie Borderie qui s'inquiète du droit de retrait que pourraient exercer certains professionnels faute de protection suffisante.
Le 26 mars, c'est la maire de Lille Martine Aubry qui a interpellé les pouvoirs publics sur Twitter appelant à rendre prioritaires les personnels des EHPAD et de l'aide à domicile dans l'attribution de masques, gants et gel hydroalcoolique.
Merci aux personnels des EHPAD et de l’aide à domicile qui font un travail remarquable auprès de nos aînés. Ils doivent être protégés : je demande à l’Etat qu’ils soient prioritaires aussi en tant que soignants pr bénéficier de protections essentielles (masques, gants, gel). 1/2
— Martine Aubry (@MartineAubry) March 26, 2020
Mardi 31 mars lors des questions au gouvernement à l'Assemblée nationale, Olivier Véran a été interpellé sur le sujet par le député Olivier Marleix (LR). « Quarante millions de masques ont été déstockés au profit des hôpitaux, des EHPAD et des aides à domicile et la médecine de ville », a promis le ministre qui reconnaît toutefois les « difficultés auxquelles nous sommes confrontés et dont souffrent en conséquence les soignants sur notre territoire ».
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