S’il n’est pas une surprise, le maintien au gouvernement de Marisol Touraine aux Affaires sociales et à la Santé (avec en plus le dossier des Droits des femmes) est accueilli sans enthousiasme, et parfois même avec des mots sévères, par les principaux syndicats de médecins libéraux.
Mais davantage que la personne, c’est la ligne politique traduite dans l’avant-projet de loi de santé, dont une version écrite a été dévoilée fin juillet, qui cristallise les vives inquiétudes de la médecine de ville. À cet égard, la reconduction de Touraine au gouvernement confirme que c’est bien ce cap tracé depuis des mois qui sera suivi pour la deuxième partie du quinquennat.
Mesures jugées toxiques
« Ce qui importe, ce n’est pas tant le nom du ministre que le projet qui est porté, résume le Dr Jean-Paul Ortiz, président de la CSMF. Or, si rien ne bouge, cette loi Touraine qui organise la mainmise de l’État sur la santé avec le bras armé des ARS, et comporte des mesures emblématiques toxiques comme le tiers payant généralisé et l’autorisation du "testing" risque de soulever rapidement une levée de boucliers de la médecine libérale. »
Même tonalité très critique au Syndicat des médecins libéraux (SML) : « Il n’y a pas de changement à espérer, redoute le président Roger Rua. Touraine, c’est toute la loi de santé avec le passage en force sur le tiers payant, des ARS omnipotentes sur l’organisation territoriale, les subventions et les autorisations, le retour du "testing"... On ne nous a absolument pas écoutés, ça me rappelle HPST [la loi dite "Bachelot" Hôpital, patients, santé et territoires], la rentrée sera donc tonique. »
Dogmatisme
« Touraine est inoxydable, soupire de son côté le Dr Jean-Paul Hamon, patron de la Fédération des médecins de France (FMF). Son avant-projet de loi de santé, s’il va à son terme, c’est la fin de la médecine libérale. Je n’ai jamais vu un tel dogmatisme ! Plus aucun jeune ne voudra s’installer en libéral dans un tel système où l’administration a les pleins pouvoirs. »
Seul MG France se démarque, tout en restant prudent sur la suite. « Le maintien de Marisol Touraine au gouvernement n’est pas une mauvaise chose, sinon on aurait perdu deux ans avant d’avoir un nouveau cap », juge le Dr Claude Leicher, président du syndicat de généralistes. Il attend toutefois la concrétisation des « chantiers inaboutis » (dont celui sur la rémunération des équipes de soins) et, à tout le moins, une clarification sur le futur service territorial de santé au public inscrit dans le projet de loi de santé. « Le risque, c’est de se retrouver avec un système ambulatoire totalement administré, met en garde le Dr Leicher. Il faudra que le texte de loi soit amendé, allégé, et que les professionnels libéraux puissent s’auto-organiser. »
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