C’est dans une maison pluridisciplinaire du Val-d’Oise, aux confins de l’Eure et de l’Oise, deux départements touchés par la désertification médicale, que Marisol Touraine a annoncé la généralisation de la rémunération des structures de soins pluridisciplinaires, vendredi dernier.
« À l’horizon 2017, 1 000 structures pluridisciplinaires où exercent près de 10 000 professionnels [médecins libéraux ou salariés, paramédicaux et soignants, NDLR] seront rémunérées à hauteur de 50 000 euros en moyenne par an pour la prise en charge coordonnée de près de quatre millions de patients », a déclaré la ministre de la Santé devant l’équipe de soins de la maison pluridisciplinaire de Magny-en-Vexin, bourg cossu de 6 000 habitants.
Gagnant-gagnant
Selon le ministère, 50 millions d’euros seront affectés chaque année à ces nouveaux modes de rémunération. Ils pourront potentiellement être distribués à 600 maisons et pôles et 400 centres polyvalents ou médicaux existants. Deux cent maisons supplémentaires devant être créées en 2015 pourront également prétendre à leur part de butin.
La ministre a mis en avant les vertus des structures pluridisciplinaires qui améliorent l’organisation de la prise en charge du patient par les professionnels, facilitent l’accès aux soins et répondent aux attentes des jeunes médecins. « C’est du gagnant-gagnant », a-t-elle répété à plusieurs reprises. On estime aujourd’hui à 5 000 le nombre de médecins exerçant en maison pluridisciplinaire et à 2 200 ceux qui sont salariés d’un centre.
Signal politique
Marisol Touraine reprend la main en réglant un dossier sensible sur lequel les libéraux, les centres de santé et l’assurance-maladie n’ont pas réussi à s’entendre lors des négociations conventionnelles sur les soins de proximité à l’automne dernier. Elle débloque une situation qui pénalisait un grand nombre de maisons de santé et elle réaffirme dans le même temps sa préférence pour la rémunération de la coordination interprofessionnelle en structure plutôt que la revalorisation du « C ». Bref, la ministre de la Santé envoie un signal politique fort à ses détracteurs à l’aube de la manifestation nationale du 15 mars contre son projet de loi, initiée par les internes et à laquelle se sont ralliés les professionnels libéraux.
La ministre n’a pas perdu de temps. 72 heures lui ont suffi pour valider le règlement arbitral que lui a remis Bertrand Fragonard, expert chargé après le fiasco des « négos interpro » d’élaborer un canevas alternatif au cadre conventionnel pour la rémunération des structures.
Ce règlement pérennise donc les expérimentations des nouveaux modes de rémunération (ENMR), dotations qui finançaient l’an dernier 260 maisons et pôle et 40 centres de santé, qui vivaient jusqu’à vendredi dans l’attente du renouvellement de leur financement. La nouvelle enveloppe forfaitaire pour 2015 sera délivrée au cours du second trimestre, après parution d’un décret au « Journal officiel », attendue dans une dizaine de jours.
Le médecin traitant de l’enfant pris en compte
Les structures qui souhaitent bénéficier du même traitement devront s’engager à respecter un nouveau cahier des charges, a priori similaire sur le fond à celui des NMR et voisin sur la forme de la rémunération sur objectifs de santé publique (ROSP) : respect du travail en équipe (concertation, protocoles, formation), de l’accès aux soins (horaires élargis, par exemple) et du partage du système d’information. La rémunération des structures, variable selon la taille de la patientèle des médecins traitants, pourrait gonfler un peu. Marisol Touraine a ajouté aux critères fixés par le règlement arbitral, la prise en charge des moins de 16 ans dans la patientèle, en cohérence avec la création du médecin traitant de l’enfant dans la loi de santé.
Sans réouverture de négociations conventionnelles par l’assurance-maladie, le règlement arbitral courra jusqu’en 2017, année où la convention médicale mais aussi les instances professionnelles et gouvernementales doivent faire peau neuve.
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