PAR LE Dr ROBERT COHEN*
LA DIRECTION générale de la santé (DGS) et le Haut Conseil de santé publique (HCSP) ont publié deux documents sur l’avenir de la vaccination en France. Le rapport de la DGS intitulé « Programme national d’amélioration de la politique vaccinale 2012-2017 » comporte cinq axes dont la simplification du calendrier vaccinal, l’incitation à la vaccination et l’amélioration du suivi ainsi que de l’évaluation de la politique vaccinale. Le second, provenant du HCSP, précise que « dès 2013, le nouveau calendrier comportera une réduction du nombre de doses de vaccins administrés chez les nourrissons ». Il est logique de penser que le calendrier vaccinal 2013 s’orientera vers un schéma 2-4 mois et un rappel autour de l’âge de 1 an (le schéma de type scandinave). À suivre...
Coqueluche.
Plusieurs études récentes (États-Unis, Australie, Royaume-Uni) suggèrent une recrudescence d’épidémies de coqueluche. L’interprétation de l’augmentation de coqueluches est un phénomène complexe. La définition des cas cliniques et surtout les méthodes de diagnostic ont changé : la PCR utilisée maintenant est beaucoup plus sensible (permettant de faire beaucoup plus souvent le diagnostic), mais moins spécifique (car elle amplifie aussi d’autres Bordetella dont B. holmesii).
Des données récentes (1, 2) fondées sur le recueil de données à l’occasion d’épidémies suggèrent que l’efficacité après rappel diminue plus rapidement (quelques années) chez les enfants dont la vaccination de base a été faite par des vaccins acellulaires. Cela devra conduire augmenter la fréquence des rappels avec des vaccins contenant une valence acellulaire dans l’enfance et probablement à l’âge adulte.
Il faut rappeler que l’objectif principal de la vaccination n’est pas l’éradication de la coqueluche, mais la prévention des coqueluches sévères, voire mortelles, chez les nourrissons. Cela passe d’abord par une vaccination précoce des nourrissons et de leur entourage – familial et professionnel – comme cela est recommandé en France. L’impact potentiel de rappels supplémentaires (enfance, adultes) devra aussi être réexaminé.
Vaccins antiméningococciques conjugués ACYW135.
En 2012, Menvéo (Novartis) a vu son AMM modifiée en permettant son administration dès l’âge de 2 ans et un autre vaccin, Nimenrix (GSK), a obtenu une AMM dès l’âge de 1 an. Ces deux vaccins devraient remplacer systématiquement et pour toutes les indications les vaccins polysaccharidiques existant (AC ou ACY135), car ils sont plus immunogènes et n’exposent pas aux phénomènes d’hyporéactivité immunologique :
– vaccination des sujets à risque élevée d’infections à méningococciques (déficit en complément ou en properdine congénitaux ou acquis) ;
– vaccination avant un séjour en zone d’endémie ou d’épidémie à méningocoque A, Y ou W135 ;
– vaccination autour d’un cas index à méningocoque A, Y ou W135.
HPV.
La vaccination contre les papillomavirus humains (HPV) est recommandée en France à l’âge de 14 ans. Le Groupe de pathologie infectieuse pédiatrique de la Société française de pédiatrie (GPIP) et l’association française de pédiatrie ambulatoire (AFPA) ont clairement pris position pour un avancement de l’âge de cette vaccination à 11-12 ans sur les éléments suivants (3). Les données sur la persistance à long terme des anticorps protecteurs sont rassurantes. Ces vaccins peuvent être coadministrés avec les vaccins recommandés dans le calendrier vaccinal actuel. Près de 20 % des adolescentes ont déjà eu des rapports sexuels au moment où le schéma vaccinal est fini actuellement. Vacciner au delà de 14 ans augmente le risque de coïncidence de survenue de maladies auto-immune. L’immunogénicité des vaccins contre HPV est meilleure lorsqu’ils sont administrés avant 15 ans. Enfin, notamment en permettant de réduire le nombre d’injections vaccinal de trois à deux, l’avancement de l’âge de la vaccination pourrait contribuer à améliorer la couverture vaccinale qui est aujourd’hui largement insuffisante.
Rotavirus.
En 2008, puis en 2010, le comité technique des vaccinations et le HCSP n’ont pas recommandé la vaccination généralisée contre les rotavirus (RV) en France. Le GPIP et l’AFPA estiment qu’il est temps de reconsidérer cette position (4). En effet, d’une part, des réponses ont été apportées concernant la présence de circovirus dans les vaccins RV et le risque d’invagination intestinale aiguë et, d’autre part, ces vaccins RV sont déjà dans les programmes de vaccination de nombreux pays pauvres ou à revenu intermédiaire et élevé. Des études indépendantes ont démontré l’efficacité sur le terrain dans les pays ayant généralisé cette vaccination. De plus, cette mesure aurait un impact majeur sur notre système de soins, la modification de l’épidémie des infections à RV sous l’effet de la vaccination permettant d’éviter la coexistence des différentes épidémies hivernales. Sur le plan du rapport coût efficacité, Il paraît étonnant que des pays dits pauvres ou des pays à revenu intermédiaire aient pu généraliser cette vaccination et que la France ne puisse pas le faire.
* Pédiatre infectiologue, centre hospitalier intercommunal de Créteil.
(1) Klein N et coll. N Engl J Med 2012;367:1012-9.
(2) Witt MA et coll. Clin Infect Dis 2012;54:1730-5.
(3) Cohen R. Archives de Pédiatrie 2012;19:S145-9.
(4) Dommergues MA. Archives de Pédiatrie 2012;19: S150-4.
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