« J’AI DÉTESTÉ être enfant, témoigne Hugo Horiot aujourd’hui âgé de 30 ans, je voulais repartir à zéro ou devenir grand tout de suite, je n’aimais pas l’école ni la façon dont on s’adresse aux enfants ». Avant d’être Hugo, Hugo a été Julien prénom de la naissance, de l’enfance et de la souffrance. Julien est un bébé étrangement calme qui dès l’âge de 18 mois inquiète ses parents. Julien, "enfant non verbal" ne dit mot avant l’âge de 6 ans. Un retard abyssal dans le langage que Hugo Horiot compare à celui de la prise en charge de l’autisme en France. « Ma mère m’a retiré très vite du monde médical et surtout de l’emprise des psychanalystes qui n’ont eu d’autre vocation que de la culpabiliser », explique Hugo Horiot dont le père, Jean-Claude Horiot a exercé comme cancérologue à Dijon. « Mon rapport au monde médical a été très très bref. Psychanalyser un autiste privé de sa communication, c’est une aberration. Heureusement j’ai échappé à cela ». L’alphabet ? Il l’a appris en 2 jours lorsque sa mère, de guerre lasse, décida d’écrire sur les murs de sa chambre les 26 lettres qui le compose, en taille géante.
Hugo versus Julien
À 6 ans, Julien devient Hugo. « Après avoir décapité Julien , j’ai nommé Hugo roi de mon corps et de mon esprit. Empereur suprême de mon royaume ». Hugo parle et entre au collège dans un établissement « normal ». Un système vécu comme « carcéral » auquel il s’adapte pour échapper à l’hôpital de jour « où on ne fait rien où l’on attend " l’éveil du désir" » s’amuse aujourd’hui Hugo Horiot. C’est aussi ce qui le sauvera, être dans un système scolaire « normal ». « Mettre les autistes ensemble et à l’écart des autres, c’est un peu comme mettre la poussière sous le tapis ».
Au collège, chapitre intitulé « les années noires », les élèves lui font fait payer sa différence, les professeurs le poussent vers la sortie. « Madame, il y a un problème. Votre fils parle un langage soutenu. Ce serait bien qu’il cesse et qu’il se mette au niveau de ses camarades » estime la professeure de lettres de l’époque face à un enfant qui ne parle ni grossièrement, ni familièrement.
« À partir de l’âge de 15 ans, je suis devenu insoupçonnable » raconte Hugo Horiot, qui décide d’étouffer sa différence, d’entrer dans la norme comme on entre au couvent, de taire son originalité, d’être dans l’anonymat. « Maintenant je suis au lycée, je suis invisible. À l’intérieur j’ai tout enfoui très loin. Je ne suis plus qu’une enveloppe insignifiante et sans intérêt » écrit-il. Un reniement qui durera 15 ans, jusqu’à un soir d’ivresse avancée où Hugo Horiot devenu comédien décide de ce projet littéraire.
« Je ne fais pas une thérapie sur le dos des lecteurs, pas plus que je ne fais de thérapie sur le dos des spectateurs quand je joue au théâtre. C’est un projet formel ». Une démarche littéraire qui s’inscrit aussi comme une réponse au livre que sa mère, Françoise Lefèvre** lui a consacré autrefois. « Elle a tout découvert en lisant. Tout ce qui se passait dans ma tête. Je lui rends hommage, chant contre chant ».
Aujourd’hui, Hugo Horiot se défend de tout militantisme, il n’appartient à aucune association mais ne manque pas de témoigner lorsqu’il y est invité. « L’idéologie psychanalytique dans l’autisme est un gâchis humain et financier. Nous sommes à la traîne, le monde entier est passé à autre chose. On se prive d’un énorme potentiel » s’insurge-t-il. Encore faut-il être entendu. D’aucuns vont jusqu’à lui reprocher le diagnostic comme si l’autisme était sa propre invention.
*l’Iconoclaste, 17 euros, 205 pages ; ** Françoise Lefèvre " Le petit Prince Cannibale " couronné par le Goncourt des Lycéens en 1990
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