C’EST en étudiant la pulpe dentaire de squelettes exhumés à Douai lors de travaux réalisés en 1981, que le Pr Didier Raoult, de l’unité de recherche sur les maladies infectieuses et tropicales émergentes, et des chercheurs du laboratoire d’anthropologie bioculturelle de Marseille ont pu identifier des agents responsables de la fièvre des tranchées mais aussi du typhus. Leurs travaux sont publiés dans la revue « PLOs one » du 27 octobre. Les chercheurs ont d’abord pensé que les cadavres retrouvés avaient été victimes de la guerre menée par Louis XIV entre 1710 et 1712 pour la succession d’Espagne, au cours de laquelle Douai avait été assiégée à plusieurs reprises. L’âge supposé des victimes et certains documents d’archives tendaient à suggérer qu’il s’agissait là d’une installation militaire. Toutefois, « la disposition des squelettes retrouvés dans ces sépultures ainsi que l’absence de lésions traumatiques provoquées par des armes laissaient supposer la survenue d’une épidémie, vraisemblablement plus meurtrière que les combats à l’époque du siège de Douai au début du XVIIIe siècle », expliquent les chercheurs. Seuls cinq individus présentaient des traces de blessures et ils étaient enterrés à part. Pour les 21 autres, la cause de la mort restait inconnue.
Les analyses de biologie moléculaire réalisées sur 55 dents des 21 squelettes ont confirmé cette hypothèse. Grâce à des extractions d’ADN à partir du tissu dentaire, les scientifiques ont pu mettre en évidence la présence de Bartonella quintana, bactéries responsables de la fièvre des tranchées mais surtout de Rickettsia prowazekii, responsable du typhus.
Napoléon comme Louis XIV.
Ce n’est pas la première fois que cette approche combinant l’anthropologique et la paléomicrobiologie permet de faire le diagnostic de pathologies anciennes. La même équipe avait déjà montré en 2005 que les soldats de la Grande armée napoléonienne avaient été terrassés à Vilnius après la traversée de la Bérézina par les mêmes pathogènes, Bartonella quintana et Rickettsia prowazekii. Le génotypage de R. Prowazekii a montré qu’il s’agit de la même souche qui a aussi sévi de manière régulière en Espagne.
Les squelettes constituent la plus ancienne preuve de la présence en Europe du typhus transmis par les poux lorsque les conditions sanitaires sont mauvaises, notamment pendant les guerres. Les chercheurs estiment que, dans certaines conditions, la population des poux peut croître de 10 % par jour. La plupart des auteurs estiment que le typhus, défini pour la première fois par Boissier de Sauvages en 1772, même si les descriptions de Fracastor date du XVIe, a été introduit en Europe tardivement par les conquistadors espagnols revenant des Amériques. L’épidémie de Douai au cours de la guerre opposant Français et Espagnols semble le confirmer.
La pulpe dentaire est un excellent témoin pour ce type d’étude, car bien protégé par la dentine et l’émail, elle est le seul tissu conjonctif à persister plusieurs milliers d’années.
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