La Société française de nutrition (SFN), la Société française de pédiatrie (SFP) et la Société française de santé publique (SFSP) ont exigé des clarifications sur l'expérimentation menée par le Fonds français pour l'alimentation et la santé (FFAS), dans une note adressée à Benoît Vallet (directeur général de la santé) et Christian Babusiaux (président du FFAS) qui président le comité de pilotage de l'évaluation des logos nutritionnels.
Cette expérimentation, qui débute aujourd'hui pour une période de 10 semaines, vise à expérimenter 4 logos nutritionnels (deux synthétiques : Nutri-Score 5-C, et Sens, et deux analytiques : Nutri-Repère et « Traffic Light » britannique) dans 60 magasins pour déterminer lequel sera recommandé auprès des industries agro-alimentaires. Les 3 sociétés savantes, qui réagissent en tant que membres du comité de concertation sur le système d'information nutritionnelle, s'inquiètent des controverses qui éclatent régulièrement autour du travail coordonné par le FFAS.
Le feuilleton nutritionnel
Au cours de la première moitié de l'année 2016, on avait en effet assisté à la défection de 3 membres du comité scientifique : Karine Gallopel-Morvan, de l’École des hautes études en santé publique (Rennes), le Pr Philippe Ravaud de l’équipe de recherche INSERM « Méthodes de l’évaluation thérapeutique des maladies chroniques » (METHODS) et Denis Hémon du Centre de recherche épidémiologie et statistiques de Paris-Sorbonne. Ce fut ensuite au tour du Pr Yves Lévy (PDG de l'INSERM) de quitter le navire.
Les sociétés savantes se sont déclarées très « inquiètes » par cette série de démissions. « Certains ont dit publiquement qu'ils avaient démissionné pour des désaccords de fond », rappellent les signataires, et notamment sur « la gestion des liens d'intérêt, la robustesse du protocole, la collecte des données, et la qualité de leur analyse ». Ils craignent que l'essai ne soit négatif, « du fait d'un manque de puissance ou de biais impossibles à maîtriser ».
En juin dernier, le président de l'Association nationale des industries alimentaires (ANIA) et le secrétaire général de la Fédération du commerce et de la distribution (FCD) avaient défrayé la chronique en demandant, dans un courrier adressé au ministre de l'Agriculture, Stéphane Le Foll, de « mettre fin » aux travaux de l'équipe de recherche du Pr Serge Hercberg à l'origine du Nutri-Score 5C, afin « qu'aucune des conclusions de cette étude ne puisse interférer » avec l'évaluation en cours.
Cette démarche, qualifiée « d'intrusion totalement inacceptable » par le Pr Hercberg, a par la suite été minimisée par Stéphane Le Foll dans une lettre adressée la semaine dernière à « Médiapart », qui estiment que les distributeurs n'ont fait « qu'exprimer leurs inquiétudes auprès des ministères compétents ».
On invoque l'OMS
Concernant « l'hypothèse des mesures dilatoires de l'industrie alimentaire », les sociétés savantes demandent aux pouvoirs publics de s'engager à défendre « formellement » un score synthétique coloriel si l'expérimentation devait en démontrer la supériorité. Ils suggèrent aussi de faire bénéficier l'expérimentation d'une expertise scientifique étrangère aux différentes étapes de l'expérimentation, proposant celle de l'OMS, afin de « peser dans des négociations dures à Bruxelles ».
Cette prise de position a été exprimée dans une note à l'adresse des présidents du comité de pilotage de l'évaluation des logos nutritionnels remise lors de la dernière réunion en date du comité de concertation auquel elles ont participé. Les sociétés savantes avouent cependant ne pas savoir si cette prise de position avait été suivie d'effet.
Si les signataires reconnaissent qu'une concertation entre l'ensemble des parties prenantes est nécessaire, « c'est à la puissance publique de piloter un programme national nutrition santé ambitieux, aussi loin que possible des liens d'intérêt, qu'ils sont commerciaux ou scientifiques ». Ils estiment en outre qu'il serait « extrêmement dommageable [...] que les dissensions s'expriment entament la confiance du public dans la politique nutritionnelle ».
L'étiquetage nutritionnel a largement attiré l'attention du grand public : une pétition lancée sur Change.org a rassemblé plus de 220 000 signatures en 9 mois.
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