La tuberculose est devenue une maladie rare en France, constate Santé Publique France (SPF), dans le dernier Bulletin Épidémiologique Hebdomadaire (BEH), consacré à cette pathologie. Son incidence n’a cessé de reculer depuis plusieurs décennies : elle est passée de 155 cas pour 100 000 habitants en 1946, à moins de 20 à partir de 1986.
Mais ces résultats, encourageants quant aux objectifs d’éradication de la maladie, masquent de fortes disparités territoriales. Un article de ce BEH se penche sur la Seine-Saint-Denis où l’incidence de la tuberculose est quatre fois supérieure au niveau national.
Une moyenne de 414 nouveaux cas par an
Entre 2013 et 2018, 2 482 cas y ont été déclarés, soit une moyenne de 414 cas par an. Dans le département, l’incidence de la maladie était en moyenne, sur les années 2013-2018, de 26,1 cas pour 100 000 habitants, avec un pic en 2014 à 27,8 cas pour 100 000 habitants. En France métropolitaine, l’incidence n’était, sur la même période, que de 7,3 cas pour 100 000 habitants en moyenne.
Ces chiffres mettent en lumière les difficultés socio-économiques du territoire, qui se démarque des autres par les « valeurs extrêmes » qu’il affiche, notent les auteurs. Alors que la tuberculose est une pathologie étroitement liée aux conditions de vie, la répartition de la maladie dans le département est « similaire à celle des indicateurs de défavorisation sociale », observent les auteurs. Dans le Nord-Ouest de la Seine-Saint-Denis, où les taux de pauvreté sont les plus élevés, le taux d’incidence monte jusqu’à 46,5 cas pour 100 000 habitants.
Des cas au conditions de vie précaires
Ce sont les populations les plus précaires qui sont atteintes. Parmi les 2 482 cas recensés entre 2013 et 2018 dans le département, 42 % vivaient dans des conditions de vie difficiles. « Au niveau national, 27 % des cas étaient sans domicile fixe ou résidaient en collectivité en 2017 », rappellent les auteurs.
Parmi ces cas, 81 % sont nées à l’étranger (63 % sur l’ensemble de la France en 2017). « Cette proportion était en progression, passant de 77 % en 2013 à 80 % en 2018 », précisent les auteurs. Parmi eux, 59 % étaient nés en Afrique (42 % en Afrique subsaharienne), 18 % en Asie (9 % dans le sous-continent indien). « Entre 2013 et 2018, on constatait une tendance à l’augmentation en proportion du nombre de patients nés en Afrique, ainsi qu’une diminution du nombre de patients nés en Asie », lit-on encore.
Ces cas nés à l’étranger connaissent des conditions de logement plus difficiles que ceux nés en France (47 % vs 16 %). De même, plus l’arrivée en France est récente, plus les conditions sont difficiles (67 % pour ceux arrivés depuis moins de 5 ans vs 32 % pour les autres). « Les conditions de vie dégradées des personnes récemment arrivées en Seine-Saint-Denis pourraient être à l’origine de la transformation en maladie d’une infection latente, acquise dans le pays d’origine, au cours de la migration ou à l’arrivée en France », soulignent les auteurs.
Veille active et dépistage ciblé
La situation sociale particulière de la Seine-Saint-Denis expliquerait ainsi la forte incidence de la tuberculose dans la population du département. Pour lutter contre cet état de fait, deux types d’action sont menés le Clat (Centre de lutte anti-tuberculose) de Seine-Saint-Denis : une veille active et un dépistage ciblé.
Dans le premier cas, le Clat organise un dépistage mobile lorsque deux cas au moins ont été déclarés sur un même site dans une courte période. Dans le second, la structure mène des actions régulières au centre d’accueil, de soins et d’orientation de Médecins du Monde de Saint-Denis, ou à la Cellule d’accueil des mineurs non-accompagnés à Bobigny. Ces actions sont l’occasion de proposer une offre polyvalente à ces populations (dépistage des IST, rattrapage vaccinal, promotion de la santé bucco-dentaire).
Ces interventions « nécessitent des ressources adaptées : médiation, accompagnement social, temps de consultation allongés, insistent les auteurs. Le double enjeu, épidémiologique et de rattrapage des inégalités territoriales et sociales, appelle donc un fort niveau d’engagement des pouvoirs publics ».
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