Le scandale des bébés génétiquement modifiés, en Chine, a porté à la lumière un acteur clé de l'infection par le VIH : la protéine CCR5. « Située à la surface des globules blancs, elle a un rôle majeur dans la transmission du VIH et le développement de l'infection. La majorité des VIH l'utilisent », explique Bernard Lagane, chercheur INSERM. Une mutation (CCR5Δ32) rend ceux qui la portent particulièrement résistants à l'infection au VIH, raison pour laquelle le généticien chinois He Jiankui l'a introduite dans le génome de trois bébés, espérant ainsi les protéger du sida…
Aujourd'hui, une étude conduite par Bernard Lagane montre à quel point le problème est complexe. Publiée dans « PloS pathogens », elle révèle en effet la multiplicité des formes de CCR5. Menée par une équipe INSERM/CNRS/institut Pasteur/université Toulouse III-Paul Sabatier, elle a été financée par l’Agence nationale de recherche sur le sida et les hépatites virales (ANRS).
Plusieurs types de virus
« CCR5 est, avec CXCR4, un des co-récepteurs du VIH. Il agit de concert avec CD4 pour permettre au virus d'entrer dans la cellule, rappelle Bernard Lagane. CCR5 est un récepteur très polymorphe, qui peut adopter plusieurs conformations différentes. Les proportions relatives de ces différentes formes varient d'un type cellulaire à l'autre », explique le chercheur. Ainsi, les lymphocytes T CD4 ne vont pas exprimer les mêmes types de CCR5 que les macrophages. « Nous pensons que cela sous-tend la capacité d'une souche virale à infecter tel ou tel type de cellules », précise Bernard Lagane.
Les chercheurs ont en effet mis en évidence la capacité d'adaptation du virus. Tout comme CCR5 est doué de plasticité, les virus que l’on retrouve chez un individu sont très divers, en particulier au niveau de la glycoprotéine d'enveloppe du virus, partie qui interagit avec CCR5 et qui lui permet de pénétrer dans les cellules. En cause notamment : la pression du système immunitaire de l’hôte infecté.
Les chercheurs ont alors montré que les différentes formes de virus se distinguent par la nature des formes de CCR5 qu’elles reconnaissent et que cela a une incidence sur le rôle de ces virus dans l’infection. « La nature de CCR5 façonne ainsi les propriétés du virus, notamment son tropisme cellulaire, c’est-à-dire l’éventail des cellules qu’il va infecter. En effet, la nature des cellules que le virus va être capable d'infecter dépend de la nature des formes de CCR5 que cette cellule exprime », complète Bernard Lagane.
La forme monomérique, plus propice à l'entrée du virus
Plus en détail, les chercheurs ont étudié CCR5 sous sa forme monomérique et oligomérique. « Lorsqu'on empêche les unités de protéines de s'associer en oligomère, la capacité du virus à entrer dans les cellules T CD4 augmente, ce qui suggère que la forme monomérique favorise l'entrée du virus », décrypte le chercheur.
Ces observations n'ont pas été faites au niveau des macrophages, mais Bernard Lagane avance une hypothèse : « D’une manière générale, les virus qui utilisent CCR5 infectent moins bien les macrophages que les lymphocytes T CD4. Nos résultats suggèrent que cela pourrait être lié à la présence de formes oligomériques de CCR5 dans ces cellules. »
Ces travaux ouvrent la voie à d'autres questions : « Existe-t-il une variabilité de la nature de CCR5 entre les individus ? En d'autres termes, la nature de CCR5 est-elle un facteur de susceptibilité à l'infection par le VIH ? », interroge le chercheur. La question reste ouverte.
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