Cela ressemble à un enterrement sans fleurs ni couronnes. Le tiers payant « fonctionne » certes pour les patients remboursés à 100 % par l'assurance-maladie (CMU-C, ACS, femmes enceintes, ALD) mais « nous ne sommes pas prêts techniquement à l'étendre », affirme ce dimanche au JDD la ministre de la Santé, Agnès Buzyn, sans s'engager sur une date.
La loi de santé votée sous le quinquennat Hollande prévoyait pourtant la généralisation obligatoire de la dispense d'avance de frais au 30 novembre 2017 à tous les patients (sans aucune sanction pour les médecins et pour la seule part Sécurité sociale, le Conseil constitutionnel ayant censuré l'obligation sur la part complémentaire).
Emmanuel Macron avait déjà promis, lors de la campagne présidentielle, de laisser le choix aux médecins de l'appliquer, en utilisant la formule de tiers payant « généralisable », et non plus de tiers payant généralisé.
Un rapport de l'IGAS très critique
La ministre confirme donc aujourd'hui ce positionnement plus pragmatique, et non pas idéologique, en raison de l'impossibilité technique de réaliser dans les faits cette généralisation obligatoire du tiers payant au 30 novembre.
Selon nos informations, le rapport très attendu de l'IGAS (lnspection générale des affaires sociales), qui sera publié dès demain, lundi 23 octobre, va expliquer précisément pourquoi le maintien dans la loi de l'obligation de pratique du tiers payant pour tous les patients au 30 novembre 2017 est « désormais irréaliste compte tenu des délais très resserrés ». Il faudrait en effet une évolution accélérée des pratiques, au détriment d'un accompagnement indispensable des professionnels.
Le message de l'IGAS, bien compris par la ministre, est clair : il ne sert à rien de s'accrocher à une généralisation obligatoire théorique fin novembre, qui n'est pas applicable techniquement, et braque de surcroît la majorité de la profession.
Ce dimanche midi, dans le grand jury RTL/LCI, interrogé à nouveau sur le TPG, la ministre a justement évoqué ce rapport de l'IGAS, qui démontre que « techniquement, le tiers payant généralisé n'est pas faisable au 1er décembre ». « C'est un problème d'informatique », résume-t-elle.
Sur une ligne de crête, la ministre s'emploie à maintenir... l'objectif d'une généralisation progressive de la dispense d'avance de frais. « Nous devons poursuivre nos efforts pour en assurer une application effective partout », dit la ministre. Il sera généralisable, c’est-à-dire que toutes les personnes qui en ont besoin puissent y accéder », a-t-elle ajouté.
Une pique contre Touraine
Les syndicats de médecins libéraux étaient depuis le départ vent debout contre cette mesure emblématique de la réforme de loi Touraine. Le président de la CSMF, le Dr Jean-Paul Ortiz, a immédiatement salué sur Twitter le nouveau cap donné par la ministre sur un sujet ultrasensible.
Tiers payant généralisable : promesse bientôt tenue
— Jean-Paul Ortiz (@drjportiz) 22 octobre 2017
En revanche, contrairement à une requête de l'UFML (Union française pour une médecine libre), la ministre n'a pas évoqué de loi rectificative permettant de revenir formellement sur l'obligation du tiers payant, ni d'amendement gouvernemental en ce sens au projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS).
Le TIERS PAYANT est DEJA Generalisable !!!! Ou est le pb ! Il faut loi rectificative pour figer système pic.twitter.com/OBZPrTQ4f7
— DrMartyUFML (@Drmartyufml) 22 octobre 2017
A noter que, pour la première fois, Agnès Buzyn, agacée, a jeté une grosse pierre dans le jardin de Marisol Touraine au sujet de cette réforme du tiers payant généralisé, qu'elle juge mal préparée. « Je regrette qu'on vote des lois sans se préoccuper de savoir si c'est faisable, a-t-elle tancé lors du Grand jury. Quand on me donne un système qui, à la fin n'est pas faisable, le cadeau n'est pas très sympathique. »
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