Dans son nouveau volet de l'étude Esteban* sur l'exposition des Français aux pesticides et aux polluants, Santé publique France (SPF) constate une baisse des niveaux d'imprégnation de la population. Néanmoins, il ressort aussi de l'enquête des niveaux d'exposition non négligeables à des substances interdites.
Dans le cadre du programme national de biosurveillance, les nouvelles données d'Esteban portent sur la période 2014-2016 en France métropolitaine. Différentes substances, présentes dans de nombreuses sources environnementales et alimentaires, ont été évaluées : cinq familles de pesticides (les carbamates, les pyréthrinoïdes, les pesticides organophosphorés, les organochlorés spécifiques et les chlorophénols), les herbicides (dont le glyphosate) et divers polluants (les polychlorobiphényls PCB, les dioxines et les furanes).
50 % de la population exposée au lindane
Ce volet de l'étude Esteban montre que les niveaux d'imprégnation observés sur la période 2014-2016 sont en diminution par rapport à ceux rapportés dans l’étude nationale nutrition santé (ENNS) 2006-2007 chez les adultes, sauf pour le métabolite Br2CA de la deltaméthrine (famille des pyréthrinoïdes). Ces résultats reflètent l'effet de la réglementation : l'usage de certaines substances comme les organochlorés, les organophosphorés et les PCB, dioxines et furanes est en effet interdit en France, depuis plusieurs dizaines d’années pour certaines.
Néanmoins, une part significative de la population reste exposée à des substances interdites. Par exemple, près de 50 % de la population (adultes ou enfants) est exposée au lindane (insecticide). L'étude Esteban montre par ailleurs que moins de 20 % de la population est imprégnée en glyphosate.
De manière générale, les niveaux d'imprégnation rapportés sont semblables à ceux retrouvés en Europe et en Amérique du Nord. Il existe néanmoins des exceptions : des concentrations plus élevées ont été retrouvées en France concernant le Br2CA, le métabolite des organophosphorés (DMTP) et le β-HCH (sous-produit de la production de lindane).
Intégrer des produits bios à son alimentation pour réduire les expositions
L'enquête Esteban met aussi en évidence des niveaux d'exposition variable entre enfants et adultes : les premiers sont exposés au DMTP et aux pyréthrinoïdes, quand les seconds sont notamment exposés à certains organochlorés, au DMTP, aux pyréthrinoïdes et aux PCB, dioxines et furanes.
« Cette étude a permis de quantifier ces substances chimiques dans le corps de chacun, mais également d’identifier les facteurs qui influencent les niveaux d’imprégnations mesurés dans la population », souligne SPF.
Elle montre ainsi que la consommation d'œufs ou de matières grasses est associée à une augmentation de l'imprégnation en organochlorés, PCB, dioxines et furanes. Ou encore que les consommateurs de viande bovine sont plus exposés aux pyréthrinoïdes et aux PCB, dioxines et furanes.
« Afin de diminuer certaines concentrations, nos résultats suggèrent d’adopter une consommation alimentaire variée intégrant des produits de l’agriculture biologique. Mais également de respecter les conditions d’utilisation des insecticides au domicile et d’aérer régulièrement son intérieur », explique Clémence Fillol, responsable de l’unité surveillance des expositions à Santé publique France.
Alimenter le dispositif de phytopharmacovigilance de l’Anses
L'enquête Estaban a aussi conduit à établir des valeurs de référence d’exposition pour les organochlorés, les métabolites des organophosphorés, le glyphosate et son métabolite l’AMPA, l'acide 2,4-dichlorophénoxyacétique (2,4-D), les pyréthrinoïdes et les PCB, dioxines et furanes. « Ces valeurs de référence permettent de déterminer si une population spécifique est plus exposée à une substance donnée et à un moment donné que l’ensemble de la population », est-il précisé.
Pour SPF, « la répétition de ces études est nécessaire pour suivre dans le temps les évolutions des expositions de la population et contribuer à estimer l’impact des politiques publiques visant à réduire les expositions ».
De précédents résultats de l'étude Esteban ont concerné les substances issues des produits d’usage courant (septembre 2019), le plomb (mars 2020) et les métaux (juillet 2021). Les données issues d’Esteban permettent d'alimenter le dispositif de phytopharmacovigilance coordonné par l’Anses.
* Étude de santé sur l'environnement, la biosurveillance, l'activité physique et la nutrition
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