« JE ME CROIS capable d’autant d’amour qu’il y a 20 ou 40 ans. J’ai ressenti une pulsion vraiment amoureuse, il y a 4 ans. Et je me suis retrouvé comme j’ai toujours été, rapidement emballé et amouraché. Actuellement, je vis une vie calme, je ne désire pas, mais je ne suis pas frustré. Et l’espoir de l’amour est toujours vivace. » À 83 ans, Claude confie, assis sur le banc d’un parc, son sentiment d’existence, aussi vif que lorsqu’il travaillait comme directeur de société. La voix est certes lente, mais précise. Le sourire, au coin des lèvres. Un haïku en insert fait comprendre que l’homme est parti avant la fin du tournage. La vie, l’amour, la mort, et la poésie, les toutes premières minutes du « Sens de l’âge » concentrent déjà toute la grâce du film.
S’il propose une image joyeuse de la vieillesse, ce documentaire n’élude pas pour autant la question de la disparition, du deuil. Au contraire, la présence de la mort sublime la parole des 6 octogénaires, rare, car promise au silence. Dépouillée du superflu, elle touche à l’essentiel, comme s’ils n’avaient pas le temps de se perdre dans des conversations frivoles. La caméra, qui entre pudiquement dans l’intimité des personnes, dans leur maison, ou les accompagne au cours de leurs balades, met également en valeur la réalité unique de chacun. Pas de familles, de petits-enfants, ou d’anciens collègues de travail, ces octogénaires sont seuls face au spectateur.
Le meilleur moment…
Ils ne racontent pas une histoire, mais se racontent. Malgré leurs différences, il ressort une véritable philosophie de la vieillesse, bien éloignée des clichés. « C’est le meilleur moment de ma vie », affirme Jean, 89 ans, ancien instituteur de campagne, adepte du yoga. « Si tout tourne bien, tu ne peux pas évoluer », plaisante-t-il. Jacqueline, qui vit à Montréal, semble elle aussi avoir atteint un certain épanouissement. « Je n’ai plus d’ambition et j’arrive à vivre dans l’instant. Cela n’a plus d’importance d’être rebelle, comme je pouvais l’être. Je trouve cela merveilleux et étonnant de voir comment on évolue », songe-t-elle, le visage radieux. « Avant, j’étais plus fragile aux misères du quotidien, plus agressive aussi. Maintenant je relativise », explique de son côté Madeleine, 87 ans, qui a vendu tous ses anciens meubles. « Je n’ai plus les mêmes envies ! »
Ces octogénaires ont perdu leurs proches ou leurs conjoints. Ils n’ont plus de projets, ou celui, comme Jacqueline, de « s’asseoir dans son fauteuil et regarder ce qui se passe par la fenêtre ». Ils ne sont plus amoureux. Mais aucun de ces constats n’est douloureux. « Un contact physique avec un mari, ça ne s’oublie pas. Je ne me vois pas recommencer avec un autre, je suis bien avec toutes mes copines », résume Madeleine. Frida n’est pas loin de penser la même chose : « Je ne peux plus tomber amoureuse, j’ai eu de l’amour dans ma vie, je n’ai pas besoin de retrouver un ersatz. Je n’ai plus de désir, juste un élan d’amour pour mes proches. »
Le « Sens de l’âge »emporte ainsi le spectateur au cœur du temps présent, dans une autre dimension. Qui ne manque pourtant pas de légèreté, malgré l’urgence de la mort : et Jacqueline de monter sur des patins à glace, ou Madeleine d’acheter, dans le quartier chinois de Paris, un pistolet intergalactique en plastique.
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