LE QUOTIDIEN - Le HCSP vient de publier un avis sur les conduites à tenir dans l’éventualité de la survenue d’un cas d’infection due au nouveau coronavirus en France ? Comment évaluez-vous le risque ?
Pr CATHERINE LEPORT - Nous ne sommes pas dans une situation d’urgence sanitaire. L’alerte a été donnée par l’OMS en septembre 2012. Une possible contamination interhumaine a été confirmée en Grande-Bretagne mais les cas restent ponctuels. Nous sommes dans la phase très précoce d’un processus dont on ne sait pas comment il va évoluer. Il convient de rester vigilant, d’avoir l’œil et l’oreille attentifs. En bref, il s’agit d’informer sans alarmer.
Le COREB-SPILF est partie prenante de cet avis, la démarche est-elle nouvelle ?
Le COREB-SPILF est né en 2012, à partir de l’expérience d’une unité COREB créée en 2009 à l’AP-HP, Paris. Il est né dans sa mission et dans sa construction, des besoins du SAMU qui, face à des alertes impliquant des infections à risque épidémique (type SRAS) avait besoin d’une expertise infectiologique. L’an dernier lors des cas d’infections à Hantavirus au Yosemite Park (États-Unis), c’est le SAMU qui nous avait alertés. Nous nous étions auto-saisis et avions élaboré une procédure de prise en charge des patients suspects que nous avions transmise aux autorités. Nous avions, à cette occasion, développé des collaborations avec, outre le SAMU, les sociétés savantes concernées dont la Société Française d’Hygiène Hospitalière, la Société Française de Microbiologie, mais aussi le CNR des Hantavirus et l’InVS. La situation était aiguë. Nous avions réagi très vite, et démontré que nous savions le faire.
Cette fois nous ne sommes pas dans l’urgence. Nous nous sommes auto-saisis, mais la situation permet de mieux se préparer. Nous avons pu concrétiser les relations que nous avions établies et proposer le travail que nous avions élaboré au HCSP, lorsqu’un avis lui a été demandé par le Directeur Général de la Santé (DGS). L’avis du HCSP a intégré une grande partie du travail élaboré par le groupe SPILF-COREB. C’est un exemple de bonne collaboration entre les institutions et les sociétés savantes.
Ce type de démarche est-il amené à se renouveler ?
Nous l’espérons, en effet. Nous sommes en train de fonder, à l’occasion de cet exercice, des relations de coopération, et de travail pluridisciplinaire qui sont la clef d’une réponse mieux ajustée grâce aux regards croisés, dans ces situations qui sont toujours inédites et pleines d’inconnues. Il s’agit de mettre en pratique les propositions formulées dans le rapport sur les menaces infectieuses émergentes de la sénatrice Fabienne Keller (juillet 2012) : profiter de ce qu’on appelle « le temps de paix », le temps de la préparation, pour mettre en place les procédures les mieux adaptées.
Les médecins généralistes sont-ils associés à ces recommandations ?
Il est important de les informer. Il est essentiel qu’ils sachent que la prise en charge des patients suspects fait l’objet d’un large consensus sur lequel ils peuvent s’appuyer. Ces recommandations ont la caractéristique d’être dynamiques. Elles sont susceptibles d’évoluer en fonction de l’évolution de la situation, mais aussi en fonction de l’avis et des commentaires que feront les médecins généralistes. Ils doivent être associés à la préparation. Le fait de diffuser ces propositions aujourd’hui est une opportunité pour les questionner et susciter leurs réactions. L’objectif de la procédure SPILF-COREB, complémentaire et référant à l’avis du HCSP est, en effet, orienté vers « le premier médecin qui voit le patient » ; elle vise à lui apporter les éléments d’information nécessaires lui permettant d’exercer sa double mission d’acteur de soins et de santé publique. Car, d’une certaine façon, l’avenir d’une épidémie dépend, en partie, du premier médecin qui voit le malade.
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