ON NE SERA ni surpris ni ébloui par les commentaires auquel Lionel Jospin se livre dans son nouvel ouvrage ; on n’est pas étonné que Nicolas Sarkozy ne trouve pas grâce à ses yeux ; sa préconisation d’une refonte de la gauche est logique ; sa défense de la semaine des trente-cinq heures relève du comportement de tous les hommes d’État, incapables de critiquer leur propre bilan, mais qui s’ingénient à démolir le travail de ceux qui les ont remplacés.
Une tâche difficile.
Par ailleurs, l’ancien Premier ministre mérite toute notre considération ; le procès que l’on continue à lui faire sur son passé trotskiste est absurde, tant l’on sait aujourd’hui combien son action politique a été respectueuse des lois de la République. Tout le monde a le droit d’avoir eu une jeunesse. À la tête d’un gouvernement de cohabitation, il n’a pas eu la tâche facile, d’autant que Jacques Chirac s’y entendait pour la lui compliquer : l’un et l’autre ne luttaient pas à armes égales. M. Jospin a toujours été un homme sincère au point qu’on a eu le front de lui reprocher son manque de cynisme. Ses qualités humaines ont-elles fait de lui un grand gestionnaire du pays ? Il ne lui était pas facile de succéder à Mitterrand, dont il était l’antithèse. Ce n’est un mystère pour personne que, en 1995, Mitterrand préférait que Chirac fût élu parce qu’il ne croyait pas qu’un seul socialiste eût une stature comparable à la sienne. Pour autant, le bilan de Jospin est loin d’être négatif, même s’il est curieux que, aujourd’hui, quand les Français pensent au fameux bon temps, ils se réfèrent à Chirac plutôt qu’à la merveilleuse période de gouvernance socialiste.
CE QUI EST INQUIÉTANT, C’EST QUE M. JOSPIN PUISE DANS SON PASSÉ POUR DÉCRIRE L’AVENIR
Estimable et respectable, capable de l’ultime sacrifice comme au soir du 21 avril 2002, M. Jospin est moins convaincant aujourd’hui quand il dresse de son action un bilan enthousiaste. Il conduisait une dream team, la semaine des trente-cinq heures était une immense réforme qui a diminué le chômage, et aujourdhui, nous dit-il, il est serein. Il n’est pourtant pas difficile de lui objecter que sa dream team produit aujourd’hui le plus grand concours d’ego de l’histoire ; que la réduction du chômage, entre 1997 et 2002, relève de la croissance économique mondiale de l’époque et sûrement pas des trente-cinq heures que nous continuons à payer en ce moment-même ; et enfin que, si la gouvernance des socialistes pendant ces cinq années-là a été sublime, pourquoi M. Jospin n’a-t-il pas réussi à franchir le cap du premier tour ?
Son autosatisfaction rétroactive n’a rien à envier à celle de Nicolas Sarkozy aujourd’hui. Mais enfin, il n’est pas interdit à un ancien dirigeant de corriger l’impression qu’il a pu laisser à une opinion largement tentée par la nostalgie. Quand un homme d’État écrit des livres, c’est souvent parce qu’il n’a plus l’espoir de revenir aux affaires.
Pas de vision.
En réalité, la question porte moins sur le passé que sur l’avenir. En quoi la contribution littéraire et télévisuelle de M. Jospin peut-elle aider la gauche à reconquérir le pouvoir ? Force est d’admettre que son propos relève plus de l’autodéfense que de l’imagination. Rassemblement de la gauche, il n’est pas le premier ni le dernier à le dire ; et chacun sait que cet objectif si souhaitable n’est pas encore à portée des socialistes. M. Jospin ne dit rien d’une ascension des Verts qui risque de faire du PS non plus le premier mais le deuxième parti de la gauche ; il refuse d’ouvrir la coalition à l’UDF. Il ne sait pas, ou plutôt il ne veut pas dire qui serait le meilleur candidat du PS. Bref, il est dans un flou parfaitement conforme à celui de la gauche en général.
On aurait préféré que, à l’occasion de ce livre et de ce film, il nous apporte une vision forte, des idées neuves, une offre de changement durable. Inlassablement, il puise dans le passé, et plus particulièrement dans son passé propre : certes, il continue d’assumer la défaite du PS en 2002, mais il estime « ne pas avoir été la première cause de la défaite ». Façon de dire : en démissionnant, j’ai accompli un sacrifice. Ce qui ne m’empêche pas d’être un homme remarquable. Il a quitté la vie politique tout en y restant et en essayant de l’influencer. L’austère se marre comme il peut.
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