À moins de deux mois des régionales

La gauche en fanfare

Publié le 20/01/2010
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Crédit photo : AFP

AUX ÉLÉMENTS favorables au PS, il faut ajouter la perspective d’une belle victoire aux élections régionales. Il suffit de voir avec quel acharnement désespéré Valérie Pécresse fait campagne en Île-de-France contre un homme, Jean-Paul Huchon, qui n’est pourtant pas un leader charismatique, pour comprendre que la droite va vers une lourde défaite. Ni en Île-de-France, ni en Poitou-Charentes, ni apparemment en Paca, ni même en Alsace et en Corse, les deux derniers bastions régionaux de l’UMP, la droite ne semble vraiment en mesure de l’emporter. S’il y a une surprise, c’est parce que justement la gauche pourrait remporter le grand chelem. La voilà donc en bonne forme pour aller le cœur léger aux élections de 2012.

Sarko n’a pas dit son dernier mot.

Mais rien n’est aussi simple qu’il n’y paraît. D’abord, il ne faut pas oublier la défaite du PS aux élections européennes. Une défaite double, parce qu’il a perdu contre la droite, mais aussi contre les Verts, lesquels ont bien l’intention de confirmer leur ascension aux régionales. Le PS n’est nullement certain de conserver sa position de premier parti de la gauche et,si les Verts lui prennent des voix, il devra composer avec eux, ce qui ne lui facilitera pas la tâche. Ensuite, Nicolas Sarkozy n’a jamais dit son dernier mot. Il y a peu de chances qu’il retourne la situation pour ce qui concerne la prochaine échéance, et son leadership va être testé par la reprise ou non de l’économie : l’éventuelle réduction du chômage en 2011 lui apporterait de l’oxygène, alors qu’un chômage qui se maintiendrait à 10 % avec beaucoup de sans-emploi qui sont en fin de droits, ruinerait ses espoirs. Qu’on le veuille ou non, l’emprunt, bien qu’il aggrave la dette nationale, peut avoir des effets positifs dans les 18 mois ou les deux ans et renforcer les chances de la droite à la veille des élections générales.

LE PS SE PORTE MIEUX MAIS LE CHEMIN VERS 2012 EST JALONNÉ DE VASTES INCERTITUDES

On peut en outre accueillir l’amélioration de la santé du PS avec un grain de scepticisme. Il n’est toujours pas guéri de sa pléthore de candidats qui attendent l’heure d’entrer dans la mêlée : ce qui menace le plus Martine Aubry, ce n’est pas la droite, ce sont ces leaders du PS qui l’ont adoubée mais ne lui reconnaissent pas vraiment le droit d’être la candidate du parti. Consciente qu’elle est en perte devitesse, Ségolène Royal multiplie les « coups », tout à fait à la manière de Nicolas Sarkozy, par exemple en offrant des postes électifs à cinq membres du MoDem pour les régionales, ce qui a enragé littéralement François Bayrou. Ou comment s’aliéner ceux avec lesquels on a juré qu’on ferait alliance. François Hollande a pratiquement annoncé sa candidature. Vincent Peillon, invité à une émission de France 2 par Arlette Chabot, refuse à la dernière minute d’y participer pour s’assurer que personne, au PS, ne pourra le remplacer et il demande, comme un ayatollah, la démission de Mme Chabot. Lui qui se plaignait du comportement cavalier de Mme Royal fait pire.

Le degré zéro de la démocratie.

Et ne voilà-t-il pas qu’un autre espoir du PS, Manuel Valls, déclare qu’il ne faut pas attaquer les journalistes du service public, comme si tous les autres pouvaient être soumis à la censure ? Ce sont les mêmes qui reprochent à Nicolas Sarkozy son autoritarisme et son manque de respect pour les médias. On n’imaginait ni un Peillon aussi manœuvrier (il a retenu la leçon que lui a infligée Ségolène Royal quand elle s’est imposée à une réunion de Désirs d’avenir) ni un Valls aussi gaffeur.

À mesure que l’on avance vers les régionales et vers 2012, les esprits semblent se radicaliser, un peu comme si Sarkozy faisait des émules. Les attaques contre la presse deviennent un problème alarmant. Pas parce que le « quatrième pouvoir » devrait être à l’abri de toute critique, mais parce que, pour tous les partis politiques, rendus hystériques par les échéances politiques, il devient un bouc émissaire très commode. C’est le degré zéro de la démocratie.

RICHARD LISCIA

Source : Le Quotidien du Médecin: 8691