Les IVG dans le monde marquent un pallier

L’inquiétante proportion des avortements non médicalisés

Publié le 20/01/2012
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Crédit photo : S. Toubon

Le taux d’avortement dans le monde ne baisse plus significativement, démontre un article du Guttmacher Institute et de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). S’il a diminué de 35 à 29 interruptions volontaires de grossesse (IVG) pour 1 000 femmes entre 1995 et 2003, il se stabilise depuis, autour de 28 ‰. « Ce palier coïncide avec un ralentissement de l’adoption de la contraception. Sauf investissement accru dans des services de planification familiale de qualité, on peut s’attendre à ce que la tendance persiste », commente la chercheuse, auteur du rapport, Gilda Sedgh.

Il existe un fossé criant entre les comportements du Sud et ceux du Nord. Les pays en voie de développement concentrent 86 % des avortements en 2008, un chiffre en hausse continue. Le taux d’avortement dans ces pays s’élève à 29 ‰, contre 24 ‰ dans les pays industrialisés. Il culmine même à 38 ‰ dans l’est de l’Afrique et à 36 ‰ en Asie du Sud, tandis que l’Europe de l’Ouest affiche un taux de 12 ‰.

Phénomène dramatique, près de la moitié (49 %) des avortements dans le monde sont réalisés dans des conditions non médicalisées, une tendance qui empire depuis 1995 (où la proportion était de 44 %). En Afrique, 97 % des IVG sont pratiquées en dépit de toute considération sanitaire. Les conséquences sont extrêmement néfastes puisque les complications liées à ce type d’avortement sont responsables de 13 % des décès maternels en 2008. « Avec 17 % de la population féminine du monde en développement en âge de procréer, l’Afrique représente cependant la moitié de la mortalité imputable à l’avortement non médicalisé », souligne Iqbal H. Shah, de l’OMS, co-auteur du rapport.

Faiblesse des législations restrictives.

De plus, 8,5 millions de femmes des pays en développement souffrent de complications médicales graves, nécessitant des soins... que 3 millions d’entre elles ne reçoivent pas. « Au sein des pays en développement, les femmes les plus pauvres courent les plus grands risques. Elles ont le plus difficilement accès aux services de planification familiale et sont les plus vulnérables aux conséquences négatives d’une procédure non médicalisée. Les soins après avortement sont aussi le moins accessibles aux femmes pauvres en cas de complication », commente Iqbal H. Shah.

L’interdiction de l’IVG par les gouvernements se révèle inefficace et même contre-productive, soulignent les auteurs. En 2008, les taux d’avortement étaient respectivement de 29 ‰ et 32 ‰ en Afrique et en Amérique latine, où la plupart des États ont adopté des législations restrictives. A contrario, l’Europe de l’Ouest et du Nord, où l’IVG est autorisé dans certaines circonstances, ainsi que la sous-région d’Afrique australe où la majorité des femmes sont sous la législation libérale de l’Afrique du Sud, affichent des taux bien plus faibles.

« Cette étude établit clairement que si une femme est résolue à éviter une naissance, elle aura recours à l’avortement non médicalisé s’il s’agit là de sa seule option quoi qu’en dise la loi. Tant que l’avortement non médicalisé ne sera pas reconnu comme un problème de santé publique, les femmes, les familles et les communautés continueront à souffrir de ses conséquences, y compris la mort et la maladie », commente Richard Horton, l’éditeur en chef de « The Lancet ».

 COLINE GARRÉ

Source : lequotidiendumedecin.fr