Après la démonstration de force dans la rue le 15 mars, c’est une nouvelle bataille – incertaine – qui a commencé à l’Assemblée pour les opposants au projet de loi de santé.
La première séquence a été réussie pour les médecins hostiles au texte de Marisol Touraine. Dimanche dernier, les internes (ISNI), carabins (ANEMF), chefs de clinique (ISNCCA) mais aussi les dizaines de syndicats de praticiens installés et organisations paramédicales qui avaient appelé à manifester à Paris ont marqué les esprits. Que les blouses blanches aient été 19 000 (selon la police) ou 45 000 (selon les estimations les plus élevées) ne change pas grand-chose à l’affaire : les praticiens, et principalement la jeune génération, ont exprimé pacifiquement mais avec force leur malaise, leur colère et souvent leur exaspération. « Il y a eu une mobilisation indéniable des médecins libéraux qui traduit aussi une crise d’identité, il faut savoir écouter », analyse le Dr Claude Pigement, ex-responsable national du PS, qui souligne toutefois que « l’hôpital et les usagers n’étaient pas dans la rue ».
Déminage et procédure accélérée
Une nouvelle bataille, décisive cette fois, se déroule à l’Assemblée nationale.
Elle a commencé dès mardi en commission des affaires sociales par un travail de déminage de Marisol Touraine et des rapporteurs, sous la forme de dizaines d’amendements censés « préciser », « corriger » ou « réécrire » la copie initiale (lire ci-contre). Qu’il s’agisse de l’organisation territoriale des soins (moins étatique), de la vaccination par les pharmaciens (expérimentale et encadrée), du service public hospitalier (pas de lien avec les autorisations d’activité pour les cliniques), de la place du médecin traitant comme chef d’équipes de soins primaires ou du tiers payant (garantie de paiement), la ministre de la Santé a amendé son projet de loi si décrié, comme promis. Même si la majorité des médecins jugeront ce travail insuffisant, voire hors sujet.
Le débat dans l’Hémicycle est programmé du 31 mars au 10 avril. Chaque camp fourbit ses armes (1 760 amendements déposés...) mais Marisol Touraine ne veut surtout pas d’une interminable guerre de tranchées. C’est la raison pour laquelle le texte sera examiné dans le cadre de la procédure accélérée (une seule lecture par chambre), une stratégie peu surprenante au demeurant pour ce genre de texte.
Pas de frondeurs mais une bataille droite/gauche
Si elle sort fragilisée par les grèves, les fermetures des cabinets (encore aujourd’hui à l’appel de MG France) et la mobilisation du 15 mars, avec une impopularité record dans la profession (88 % de médecins libéraux ne lui font pas confiance selon notre récent sondage IFOP), Marisol Touraine garde un atout majeur sur le terrain politique. Contrairement au projet de loi Macron, qui a fait exploser la majorité sous les assauts des frondeurs, la loi de santé pourrait fédérer la gauche dans un affrontement classique face à l’UMP/UDI.
Le PS fait bloc autour du tiers payant généralisé et dénonce la vision « corporatiste » des médecins libéraux. Pour les écologistes, le texte va « dans le bon sens » même s’il est jugé « bancal », faute de dimension environnementale. Même le Front de gauche a salué des avancées (prévention, actions de groupe). Pas de quoi menacer la majorité... Sans surprise, la droite a prévenu qu’elle s’opposerait vigoureusement au projet de loi. « Avec la procédure d’urgence, Marisol Touraine fait un bras d’honneur aux médecins », commente Christian Jacob, président de groupe UMP.
Quant aux syndicats de médecins, les moins contestataires ont prévenu qu’ils analyseraient précisément le nouveau texte avant d’arrêter leur stratégie. Les plus radicaux préparent de nouveaux mouvements après les élections départementales et exhortent Marisol Touraine à démissionner.
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