C’ÉTAIT EN TOUT CAS un géant de l’histoire, et même ceux qui lui reprochent encore d’avoir commencé par la lutte armée (comme si l’apartheid ne représentait pas une terrible violence qui appelait la violence) avant de se convertir à la négociation, n’ignorent pas qu’il a donné, par sa seule force de conviction, le pouvoir aux Noirs en Afrique du Sud. Les réserves émises par quelque mauvais coucheurs résulte de ce qu’ils ne voyaient pas l’apartheid comme il était, c’est-à-dire une forme aigue de totalitarisme, celui que les mêmes combattent quand il est communiste, pas quand il est d’inspiration fasciste. Plutôt que d’admettre enfin ce que Mandela a apporté aux Africains et au monde, ceux qui continuent d’émettre des critiques sur son action, comme pour résister à l’enthousiasme des thuriféraires, tentent de dresser un bilan négatif ou à moitié négatif de ce qu’il a fait. Il a convaincu les Blancs de donner la liberté aux Noirs, il n’a pas réussi à faire de l’Afrique du Sud un pays exemplaire, vraiment égalitaire, prospère et puissant. Il n’a pas empêché la corruption au sein de son propre mouvement, l’ANC. Il n’a pas donné à son pays le leadership africain auquel il aurait pu aspirer. Le seul fait que la France intervienne, de temps à autre, sur divers fronts africains, montre, par contraste, l’impuissance de Prétoria.
Vision et objectif uniques.
Quand il a gouverné de 1994 à 1999, Mandela a tout de même procédé à l’indispensable redistribution des richesses qu’attendaient ses concitoyens. Mais déjà, à l’époque, il s’appuyait sur son futur successeur, Thabo Mbeki. La gestion quotidienne du pays, il souhaitait la laisser à plus compétent que lui. On ne juge pas un homme ayant joué un rôle historique sur quelques faiblesses ou quelques erreurs. Mandela a été l’homme d’une vision unique, avec un objectif unique qu’il a réalisé, alors que le rapport de forces entre lui et le régime de l’apatheid ne lui offrait aucune chance. Ce qui est admirable, c’est l’unité de sa vie, la force indestructible de son engagement, l’immensité de son sacrifice personnel. Vingt-sept années de prison au bout desquelles il a renoncé à toute vengeance, sans pour autant céder d’un pouce sur l’essentiel : la liberté des siens. Il n’est pas difficile d’imaginer ce qu’une guerre civile, qui semblait alors inéluctable, aurait fait à ce pays. Mandela a sauvé des dizaines de milliers de vies humaines. Dans ces conditions, le blâmer d’avoir été l’ami de Fidel Castro (il le fut par gratitude pour le soutien du Cubain à la cause des Noirs), ou d’avoir fréquenté Kadhafi (ce qu’ont fait d’autres présidents très recommandables), c’est procéder à la réduction d’échelle d’un géant politique et philosophique. C’est narguer, depuis le promontoire de la médiocrité, celui qui progresse, indifférent à une lointaine et inutile clameur.
MANDELA EST UNIVERSEL PARCE QU’IL S’EST CONSACRÉ À UNE SEULE TÂCHE
Les néo-réactionnaires, ces gens intelligents qui s’expriment si habilement pour défendre des causes suspectes, ont décelé le danger qu’ils encourraient s’ils adoptaient le mode critique. Le Front national a vite rejoint la chorale des louangeurs. Mais comment est-ce possible ? La famille Le Pen n’était-elle pas, jadis, favorable à l’apartheid (qui comptait beaucoup d’amis parmi des gouvernements respectables) ? Florian Philippot, jeune homme éloquent, est chargé de gérer cette contradiction. Il aime Mandela parce que lui, M. Philippot, n’est pas d’extrême droite, parce qu’il n’est pas raciste, parce qu’il n’est pas intolérant. Tout le contraire. S’il faut le croire, il pourrait aussi agir en faveur des minorités en France, en faveur du droit d’asile, en faveur de l’immigration. Vous voyez, c’est simple : d’un côté, un regard perçant qui a vu avec certitude un avenir lointain, de l’autre, la pelote enchevêtrée des contradictions. En politique, rien ne vaut la clarté, l’unité de la pensée, la mobilisation des forces autour d’un seul but.
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