QU’EST-CE qui faisait l’originalité du candidat Obama lorsqu’il s’est présenté pour un premier mandat ? Il apportait l’idée que l’Amérique devait mettre un terme à ses aventures impériales, qu’elle ne voulait plus être le gendarme du monde, qu’elle n’irait plus envahir un pays en se fondant sur des preuves inexistantes, qu’elle serait plus soucieuse du bien-être de ses concitoyens et de l’égalité entre eux que de son hégémonie mondiale, qu’elle ne serait plus l’unique superpuissance. N’oublions pas que Barack Obama succédait à George W. Bush, le président qui, avec l’aide des néoconservateurs, croyait à la mission quasi-évangélique de son pays : abattre les dictatures arabes, rendre aux peuples arabes le droit à l’autodétermination, construire tout autour de la Méditerranée des régimes parlementaires identiques à ceux de l’Occident. Au nom de cet agenda, que de crimes ont été commis, que de souffrances endurées par les envahisseurs et par les envahis, que de mensonges prononcés !
Le précédent de 2003.
En 2003, alors que M. Bush s’apprêtait à conquérir l’Irak, la France de Jacques Chirac se dressa contre lui avec une vigueur inattendue pour un allié de deux siècles et demi. Et le ministre français des Affaires étrangères, Dominique de Villepin, prononça alors contre la politique américaine un discours d’une violence exceptionnelle que les Français considèrent encore aujourd’hui comme un tournant historique de la diplomatie française, comme la preuve tangible de la souveraineté de la France, comme l’un des moments les plus subtils, les plus raffinés, les plus radieux d’une exception qu’il ne nous suffit pas de cantonner à la culture. Personne n’a osé dire alors combien il est facile de s’en prendre à un ami, et que cette attaque contre une puissance qui a, parmi ses tares, quelques vertus, drainait toute la colère française, comme si nombre d’États scélérats ne méritaient pas au moins une partie de ce courroux et comme si Saddam Hussein devenait presque plus recommandable que George W. Bush.
OBAMA FAIT EXACTEMENT CE QUE LA FRANCE ATTENDAIT DE LUI
M. Chirac et M. de Villepin auraient pu juger que l’avènement d’Obama, quelque cinq ans plus tard, exauçait leurs vœux au-delà de tous leurs espoirs. Ils n’ont pas eu la même verve pour saluer le nouveau président sans doute parce que l’ancien chef de notre diplomatie perdait le sparring partner auquel il avait asséné ses meilleurs coups. Mais les Français, plus expansifs, ont fait à Obama un accueil dithyrambique, comme les autres peuples européens. Puis, le président américain, confronté à la crise, à d’autres guerres qu’il n’a pas désirées, combattu par une opposition qui niait sa légitimité, a paru produire moins de résultats qu’il n’en promettait. C’est un tour de force s’il été réélu l’année dernière pour un second mandat, mais le charme est rompu, l’espoir retombé, la lassitude a remplacé la ferveur de l’attente. « C’est le crépuscule d’Obama », disait lundi sur une chaîne de télévision un éditorialiste connu.
Belle formule qui n’aura pas manqué de frapper les esprits, mais qui ne résulte pas nécessairement de la meilleure analyse. Barack Obama laissera à l’Amérique un précieux héritage : il aura rendu possible l’élection d’un président noir, donc issu d’une minorité, n’importe laquelle, et c’est déjà un pas immense ; il met en place une assurance-maladie qui donne à tous les Américains l’égalité devant la maladie et la mort ; il s’apprête à intégrer 11 millions d’immigrés clandestins : l’opposition républicaine rechigne, mais d’une façon suicidaire. Celui qui ne s’appuie pas sur les minorités ne sera plus jamais élu.
Quel est le message subliminal de M. Obama ? Celui qu’attendaient de M. Bush les Chirac et compagnie. « Je ne veux plus engager mon pays dans une mésaventure militaire qui épuiserait nos forces vives et nos moyens financiers. Je préfère le bonheur de chaque Américain à l’hégémonie. Mais comme mon approche des questions politiques est essentiellement humaniste, je ne peux pas fermer les yeux sur le massacre d’un peuple. Voilà pourquoi je réfléchis à une intervention qui ne ferait pas exploser la poudrière proche-orientale ». Sûr et certain, M. Obama a péché par procrastination. Il n’est pas tout à fait en phase avec un monde très compliqué où les détracteurs de la superpuissance changent d’avis dans la nuit et réclament qu’elle se comporte comme telle. Mais il fait exactement ce pour quoi il été élu deux fois. Que valent les imprécations non-interventionnistes de 2003 si, dix ans plus tard, des imprécations martiales leur succèdent ? Si la diplomatie américaine manque de rigueur, celle de la France manque de suite dans les idées. Nous parlons énormément, la rhétorique nous sert de missile. Quand nous arrêtons de parler, nous chantons la Marseillaise.
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