Un rapport de l’Inspection générale de l’environnement et du développement durable (Igedd), publié le 14 avril, appelait à agir « sans tarder » contre les substances per- et polyfluoroalkylées, les PFAS (prononcer « pifasse »). Cette famille de composés organofluorés de synthèse (plus de 4 700 molécules), utilisés pour leurs propriétés antiadhésives et imperméables dans de nombreux produits du quotidien (poêles en Téflon, emballages alimentaires, textiles, automobiles…), est soupçonnée de nombreux effets sur la santé, et notamment de favoriser l’obésité.
Dans une étude publiée dans « Obesity », des chercheurs danois confirment le lien, observé dans des études cliniques, entre exposition aux PFAS et obésité, en montrant qu’une concentration plasmatique des PFAS élevée est associée à une prise de poids dans une étude d'intervention alimentaire.
Un gain de poids corrélé aux taux de PFAS dans le sang
« L'exposition aux PFAS, en particulier à l'acide perfluorooctanoïque (PFOA), et l'augmentation de la concentration de PFAS dans le sang qui en résulte sont associées à des difficultés à maintenir un poids corporel réduit. Plus le niveau de PFOA est élevé, plus le gain de poids est important », résume Philippe Grandjean, professeur de médecine environnementale à l’université du Danemark du Sud et premier auteur.
Pour cette étude, les chercheurs se sont penchés sur les données de l'essai européen DioGenes, mené de 2006 à 2008 auprès de près de 1 800 participants issus de huit pays européens (Danemark, Pays-Bas, Bulgarie, République tchèque, Allemagne, Grèce, Espagne et Royaume-Uni). L’essai visait à évaluer l’impact de cinq régimes alimentaires sur l’évolution du poids de personnes obèses, après un régime strict et une perte d’au moins 8 % du poids corporel.
Les chercheurs ont inclus les données complètes de 381 participants pour lesquels les concentrations de cinq principaux PFAS ont été évaluées dans des échantillons de plasma prélevés au début de l’étude. En moyenne, les concentrations plasmatiques étaient de 2,9 ng/ml pour les PFOA et de 1 ng/ml pour l'acide perfluorohexane sulfonique (PFHxS).
Il ressort de l’analyse des données qu’un doublement du taux de PFAO dans le sang était associé à une augmentation de poids à 26 semaines de 1,5 kg, indépendamment du type de régime suivi et du sexe. Pour le PFHxS, un doublement du taux était associé à une prise de poids de 0,91 kg sur la même durée. « Les associations pour les autres PFAS étaient similaires et significatives, mais pas après ajustement pour le PFAO et le PFHxS », précisent les auteurs.
Une donnée à prendre en compte dans les études sur l’alimentation
« Nous avons déjà collaboré avec des collègues américains dans une étude similaire (la seule) et constaté qu'une exposition plus élevée aux PFAS est liée à un taux métabolique plus faible au repos, c'est-à-dire que les adultes brûlent moins de calories au repos ou pendant le sommeil, ce qui peut en partie être une raison pour laquelle l'exposition aux PFAS entraîne une prise de poids », explique Philippe Grandjean, soulignant que d'autres études d'épidémiologie observationnelle ont également montré un lien entre des expositions élevées aux PFAS chez les enfants et un IMC plus important.
Les auteurs prêtent ainsi des caractéristiques obésogènes à certains PFAS, suggérant que l’exposition à ces substances pourrait contribuer à ce que l’Organisation mondiale de la santé (OMS) décrit comme une « pandémie d’obésité ». « Les futurs essais alimentaires devraient tenir compte de l'exposition aux PFAS des participants à l'étude pour améliorer la précision et éviter les confusions », suggèrent les auteurs.
Ces résultats ont deux conséquences, ajoute Philippe Grandjean. « La première est que nous devrions reconnaître que des expositions élevées aux PFAS peuvent entraîner des degrés croissants d'anomalies métaboliques, telles que l'obésité (nous avons déjà établi un lien avec le diabète) », estime-t-il. Seconde conséquence : « Nous avons maintenant une meilleure raison de ne pas blâmer les personnes en surpoids en pointant leur manque d'activité physique, leur mauvaise alimentation et leur suralimentation. »
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