Nostalgique de l’URSS, Vladimir Poutine vit dans le passé. Il veut reconstituer la grandeur russe et toute tentative populaire d’autodétermination lui apparaît comme un danger mortel pour la Russie et pour lui-même. On se demande pourquoi il faudrait céder à une sorte de fatalité en vertu de laquelle une nouvelle guerre froide entre la Russie d’une part, l’Europe et les États-Unis d’autre part, deviendrait inévitable. Rien, pour le moment, n’indiquait que les Ukrainiens tendance européenne avaient pour objectif de bouter les Russes hors de Crimée ; le président russe dispose toujours, en Ukraine, d’atouts essentiels, notamment l’exportation de gaz et la capacité financière pour maintenir hors de l’eau la tête du pays en faillite ; il n’avait pas pour Viktor Ianoukovitch, le président ukrainien qui a choisi délibérément de s’enfuir, la moindre estime et l’a pourtant ressuscité ; Européens et Américains n’étaient nullement pressés d’évincer la Russie, notamment à cause du problème financier qu’elle leur pose.
Mais de même que Poutine se complaît dans les parades en torse nu qui mettent ses biceps en valeur, de même le nouveau tzar ne sait s’exprimer que par la force. Ce réflexe traduit d’abord une fragilité intérieure, peut-être parce que, au fond de lui-même, il sait que sa légitimité est contestable. Mais, comme ce genre d’homme n’est jamais à l’abri d’une contradiction, ses provocations expriment aussi son mépris des solutions démocratiques, des négociations longues et difficiles, et de la recherche du compromis. Les Russes sont partis dans un « trip » hallucinatoire d’où il ne manque que le LSD, largement compensé par le nationalisme. Il suffit de les entendre à Kharkiv, à Simféropol, à Donetsk : la révolution de Kiev serait de nature fasciste (analyse partagée par Jean-Luc Mélenchon, est-ce que l’on s’en rend compte en France ?). Il faut à tout prix protéger les statues de Lénine, ce grand bienfaiteur des peuples slaves. Et comment les amis de Ioulia Timochenko auraient-ils raison quand ils sont combattus par tous les russophones d’Ukraine ? Poutine peut dire n’importe quoi à Moscou, il sera acclamé par la plupart des russes, souvent nostalgiques d’un régime tyrannique dont ils ont oublié les atrocités.
Ils n’ont plus le communisme comme alibi.
Le jeu géopolitique que Poutine joue en Ukraine à la manière d’un Monopoly est destiné à effacer le fond de l’affaire, c’est-à-dire le terrible déficit démocratique des anciens membres du bloc soviétique. Il y a des révoltes ou des révolutions là où la mafia a remplacé la nomenklatura. Ce sont les mêmes qui pillent la Russie, la Biélorussie, l’Ukraine et tant d’autres pays. Ils s’adaptent aux convulsions historiques, mais ils ne changent jamais. Donnez-leur un système, n’importe lequel, ils en seront les éternels apparatchiks. La différence avec l’ère soviétique, c’est qu’ils n’ont même plus l’excuse d’une révolution destinée à établir définitivement l’égalité et la justice, ils n’ont même plus le communisme comme alibi. Ils accusent les autres de fascisme, ils en sont les nouveaux échantillons.
Nous n’avons pas besoin d’entrer en guerre avec ces attardés qui, mardi encore, juraient que des sanctions occidentales contre la Russie ruineraient le système financier de l’Amérique et de l’Europe. Folie des actes, folie des mots : ils n’ont pas encore compris que, dans l’économie de marché, le vendeur et l’acheteur sont liés de façon inextricable, que les Russes ne peuvent pas boire le pétrole qu’ils ne vendraient plus et que la ruine de l’Occident commencerait par la leur. Non seulement ils sont dangereux, mais ils sont bêtes. Laissons Poutine faire son numéro de Superman en Crimée. Laissons le gosse se distraire. Appliquons les sanctions et négocions. Cela prendra du temps.
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