Etendre et renforcer la politique des seuils d’activité en cancérologie et expérimenter dans cette spécialité un mode de financement alternatif. C'est, selon le Dr Ayden Tajahmady, la proposition phare du dernier rapport dit « charges et produits » de l'assurance-maladie (CNAM), celle qui mériterait de se retrouver dans le prochain budget de la Sécurité sociale. Interrogé ce mercredi lors d'un café Nile, à Paris, le directeur adjoint de la stratégie, des études et des statistiques de la CNAM, cheville ouvrière de ce rapport fleuve, a expliqué en quoi l'application de cette réforme serait bénéfique pour les patients comme pour la Sécu.
La CNAM préconise que le seuil d’activité pour la chirurgie du cancer du sein (existant depuis 2007) soit relevé de 30 à 150 interventions par an. Dans le cas du cancer de l’ovaire, pour lequel il n’existe en France aucun seuil d’autorisation spécifique, la caisse suggère la création d'un plancher de 20 interventions par an. Si ces deux nouveaux seuils étaient appliqués, « 338 établissements ne pourraient plus continuer à opérer des cancers du sein et 519 établissements ne pourraient plus continuer à réaliser de chirurgie pour cancer de l’ovaire » – soit 857 blocs opératoires, indique le rapport.
L'analyse des pratiques chirurgicales pour cancer du sein (entre 2012 et 2014) et de la survie des patientes (grâce au Système national des données de santé – SNDS) démontre clairement le lien entre surmortalité et faibles volumes.
Ajustement du tarif à l'acte
« La logique n'est pas de fermer des établissements mais d'assurer la qualité des soins maximale aux patientes, c'est ce qui doit nous guider, a souligné Ayden Tajahmady. L'enjeu est de différencier les hôpitaux dont l'activité est en dessous du seuil de ceux qui sont juste au-dessus, où il y a des gains de productivité à faire. Et puis nous sommes en 2018, on ne peut plus accepter de travailler avec ces gens qui ne respectent pas des règles qui existent pourtant depuis près de dix ans ! »
Selon Ayden Tajahmady, et à travers lui la CNAM, cette situation est le résultat d'un financement « inadapté », qui n'incite pas à respecter les dispositifs réglementaires. La politique de renforcement des seuils d'activité doit donc aller de pair avec une tarification incitative. L’assurance-maladie propose à ce titre l’expérimentation de nouveaux modes de financement instaurant une forte composante « qualité » dans les tarifs, distincte de la réalisation de l’acte et versée uniquement aux établissements, aux équipes ou aux chirurgiens vertueux. Cette nouvelle enveloppe serait financée par un « ajustement du tarif de l'acte », lit-on dans le rapport « charges et produits ».
« Il ne faut plus raisonner en financement par établissement mais par équipe de soins, a ajouté Ayden Tajahmady. Il faut également comprendre que miser sur la qualité et la pertinence permet de ne pas envisager de déremboursement comme source d'économies. Sur le cancer du sein, nos marges de manœuvre sont vastes. »
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