La DREES, organisme du ministère de la Santé spécialiste des données statistiques et des analyses sur le système de santé, démontre dans une récente étude que les enquêtes d’opinion sur le renoncement aux soins, très en vogue pour identifier les problèmes d’accès aux soins des populations, doivent être prises avec des pincettes. Les résultats varient en effet sensiblement d’une étude à une autre selon la formulation des questionnaires.
Une différence de 15 points dans les réponses
La DREES a analysé les questions de son propre baromètre d’opinion sur l’année 2013 et les réponses des 4 000 sondés de l’échantillon. Surprenante conclusion : le taux de renoncement aux soins peut varier de quinze points selon la formulation employée.
Pour parvenir à ce constat, la DREES a établi quatre questions sur le renoncement aux soins soumises à autant de groupes de 1 000 personnes du panel (similaires et établis selon la méthode des quotas).
Dans la question, la présence ou non de la notion de « raisons financières » et la précision ou non du type de soins (médecine générale ou spécialiste, dentaire, optique, etc.) influent sur la réponse.
À la question « au cours des 12 derniers mois, vous est-il arrivé de renoncer, pour vous-même, à des soins dentaires pour des raisons financières ? », 36 % des sondés ont répondu oui.
Mais la réponse à la même question saucissonnée en trois temps, sans évoquer l’aspect financier ou le type de soins de prime abord, est tout autre !
Ainsi, un des groupes a répondu à une première question (« au cours des 12 derniers mois, vous est-il arrivé de renoncer, pour vous-même, à des soins ? »), un autre s’est prononcé sur une deuxième (« A quels soins avez-vous renoncé ? ») tandis que les 1 000 derniers devaient s’exprimer sur une dernière interrogation (« Parmi les raisons suivantes, quelle est la principale raison pour laquelle vous avez renoncé à ce soin ? », suivi de six réponses possibles, dont le manque d’argent). À chaque déclinaison de la question, le taux de renoncement baisse. Au final, avec la dernière formulation plus générale, seuls 21 % des répondants ont dit avoir renoncé à des soins.
Une comparaison révélatrice
« Le Quotidien » s’est livré à une petite comparaison des récentes études sur la question. Les résultats sont pour le moins révélateurs.
En novembre 2014, une enquête du cabinet Jalma indique que « sept Français sur dix ont déjà renoncé à des soins chez un médecin spécialiste », dont 46 % à cause « du coût de la consultation ».
[]Mais les Français ne sont plus que 27 % à renoncer aux mêmes soins selon une autre étude de l’IFOP pour le cabinet Deloitte d’avril 2015. À un niveau sémantique plus fin, ils sont d’ailleurs 21 % à déclarer avoir « reporté ou renoncé » à une consultation chez un kiné, 14 % à une consultation d’un généraliste, et 13 % à une intervention chirurgicale.
Si l’on jette enfin un œil du côté de l’IRDES, organisme concurrent de la DREES, les résultats sont là encore contradictoires. L’enquête « protection sociale » effectuée auprès de 8 000 personnes en 2012 fait apparaître que le renoncement pour raisons financières concerne... 5 % des assurés âgés d’au moins 18 ans pour les consultations médicales ! La formulation des questions, très précise, est encore différente de celle des autres bureaux d’études.
La DREES émet donc une recommandation de bon sens afin que la notion de renoncement aux soins conserve toute sa pertinence : « Les comparaisons de taux de renoncement d’une année à une autre doivent être réalisées strictement avec les mêmes conditions de collecte. »
L’Académie de médecine s’alarme du désengagement des États-Unis en santé
Un patient opéré avant le week-end a un moins bon pronostic
Maladie rénale chronique : des pistes concrètes pour améliorer le dépistage
Covid : les risques de complications sont présents jusqu’à trente mois après hospitalisation