CRÉÉE EN JANVIER dernier à la suite du scandale des implants mammaires PIP, la mission sénatoriale sur les prothèses esthétiques a déploré dans un communiqué « les graves insuffisances » dans la commercialisation des dispositifs implantables, lesquels demeurent à ce jour « guère plus encadrés que les jouets ou les aspirateurs ». Pourtant leur impact est souvent comparable à celui des médicaments, en témoigne l’affaire « PIP » où d’après l’ANSM, environ 8 000 femmes ont dû se faire retirer leurs prothèses au gel de silicone frelaté. Pour intégrer le marché européen, les dispositifs médicaux ont essentiellement besoin d’un marquage « CE » (Conformité européenne) délivré par l’un des 80 organismes habilités sur le vieux continent et choisi librement par les fabricants. Ce marquage est apposé sous la responsabilité du fabricant qui doit faire preuve de la conformité de son produit aux exigences de la directive européenne concernée. En France, une évaluation scientifique des dispositifs médicaux peut être réalisée par la Haute Autorité de santé (HAS) au sein de la CNEDiMTS (Commission nationale d’Évaluation des Dispositifs médicaux et des Technologies de Santé) qui effectue une évaluation comparative et recommande la place du dispositif médical dans la stratégie thérapeutique. Un marquage CE suffit pour utiliser un grand nombre de dispositifs médicaux à l’hôpital par le biais des groupes homogènes de séjour (GHS). « Il n’y a pas besoin d’avoir une évaluation par la Haute Autorité de santé contrairement aux dispositifs utilisés en ville », a souligné Catherine Denis, chef du service évaluation du dispositif à la Haute Autorité de santé (HAS), invitée mercredi dernier à l’Académie nationale de chirurgie à l’occasion d’une session consacrée aux problèmes soulevés par les dispositifs médicaux implantables. « Mais les dispositifs particulièrement coûteux et innovants doivent être évalués par la HAS pour être inscrits sur les listes des produits et prestations remboursables », précise-t-elle. La loi du 29 décembre 2011 relative au renforcement de la sécurité sanitaire du médicament et des produits de santé prévoit une évaluation systématique par la HAS pour un certain nombre de DM, conditionnant l’achat et l’utilisation des dispositifs implantables. La liste des DM sera définie par le ministère de la Santé après avis de la HAS avec des catégories qui seront publiées chaque année, indique Catherine Denis.
Absence AMM.
« Il n’existe pas d’autorisation de mise sur le marché (AMM) des DM et donc pas d’examen préalable systématique de l’ANSM des dossiers évalués par la CNEDiMTS » , a rappelé le Pr Jean-Michel Dubernard membre de l’Académie nationale de chirurgie. L’ANSM est en revanche là pour surveiller ces dispositifs médicaux à tous les niveaux. Mais en pratique la tâche est lourde au regard du nombre particulièrement important de DM commercialisés. Selon les estimations, leur nombre s’échelonnerait dans une fourchette allant de 200 000 à 600 000 produits. À l’Assistance publique-Hôpitaux de Paris (AP-HP), une liste des DM utilisés au sein de ces établissements répertorie pas moins de 91 400 dispositifs, répartis en 4 000 classes et dont 70 % sont implantables. « Les autorités nationales sanitaires ont un pouvoir d’inspection de ces entreprises mais on ne peut pas contrôler systématiquement tout le monde », constate Jean-Claude Ghislain, directeur en charge des dispositifs médicaux à l’ANSM. Pour la mission parlementaire, « un effort général de transparence et d’harmonisation des pratiques » est désormais indispensable. « Il est urgent de préciser le rôle de ces organismes (de certification CE) et de renforcer les moyens des autorités nationales pour assurer le contrôle effectif de leur activité », poursuivent les sénateurs. Hormis les cas de fraudes de type PIP, « ce n’est pas sur les processus de fabrication des DM où l’on a le plus d’inquiétude aujourd’hui » mais au niveau du recours accru des fabricants à la sous-traitance à des entreprises pouvant se situer à l’autre bout du monde, ce qui complique sérieusement les pratiques d’inspection, explique-t-il. De plus, les contrôles inopinés par les experts restent très peu pratiqués. Comme dans la plupart des systèmes réglementaires, les audits de certification réalisés par les organismes agréés sont tous programmés. « Au niveau européen, on débat actuellement sur la manière d’ajouter aux audits traditionnels, des visites inopinées qui auraient peut-être permis dans l’affaire PIP de détecter très précocement l’anomalie du changement de matière première », évoque le directeur de l’ANSM. « Il faut une évaluation centralisée pour des classes particulières à hauts risques et pour de nouveaux produits. Ce n’est plus acceptable qu’un organisme prenne seule la décision ». Quant à remplacer le marquage CE pour les DM au profit d’une AMM délivrée par la Commission européenne, « ça me semble peu probable », estime Jean-Claude Ghislain. Afin d’améliorer la « traçabilité des dispositifs médicaux » la mission sénatoriale préconise « la mise en place de véritables registres des dispositifs implantés ». D’autres recommandations figureront dans son rapport définitif attendu pour le début du mois de juillet.
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