La pandémie du Covid-19 aura-t-elle comme conséquence inattendue l'allongement des délais d'accès à l'interruption volontaire de grossesse (IVG) en France ? Elle a en tout cas mis en lumière les problématiques récurrentes autour de l'avortement, qui s'acutisant, ont conduit le législateur à prendre des mesures d'exception.
La France est confrontée depuis des années à un paradoxe : le taux de recours à l'IVG est en légère hausse (232 200 avortements enregistrés en 2019), mais les difficultés d'accès s'aggravent, avec de fortes inégalités territoriales et sociales.
Dès le premier confinement, une centaine de médecins et de femmes politiques ont demandé l'allongement des délais légaux pour réaliser une IVG. Le ministère de la Santé a accédé à leur demande sur un point : l'IVG médicamenteuse est autorisée en ville, jusqu'à sept semaines de grossesse (neuf semaines d'aménorrhée, SA), le temps de l'état d'urgence sanitaire, en suivant les recommandations de la Haute Autorité de santé.
Feu vert du CCNE
En revanche, le Sénat s'est opposé, lors de l'examen de la loi sur l'état d'urgence sanitaire en mai, à l'extension des délais de l'IVG chirurgicale jusqu'à 14 semaines de grossesse (16 SA). Mais l'idée a été reprise dans une proposition de loi déposée par l'ex-marcheuse Albane Gaillot, qui en outre, supprime la clause de conscience spécifique à l'IVG. Les députés ont voté le texte en première lecture le 8 octobre. Le gouvernement avait alors botté en touche, s'en remettant à l'avis du Comité consultation national d'éthique (CCNE) qu'il avait sollicité.
« Il n'y a pas d'objection éthique à allonger les délais d'accès à l'interruption volontaire de grossesse (IVG) jusqu'à 14 semaines de grossesse », a conclu, dans une opinion rendue le 11 décembre, le CCNE, au regard du principe de bienfaisance à l'égard des femmes et contre l'avis de l'Académie nationale de médecine et du Collège national des gynécologues-obstétriciens de France (CNGOF).
Le Comité s'est en revanche positionné contre la suppression de la clause de conscience spécifique et a longuement insisté sur l'importance d'appliquer les lois existantes pour réduire les difficultés d'accès à l'IVG et notamment les IVG tardives. Autant de débats qui devraient être relancés lors de l'examen de la proposition de loi par le Sénat, à partir du 20 janvier 2021.
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