L ES médecins hospitaliers auront le 18 avril à la direction de l'Hospitalisation et de l'Organisation des soins (DHOS) une troisième séance de négociation sur la réduction de leur temps de travail.
Pour l'instant, les discussions paraissent mal engagées puisque deux intersyndicales de praticiens hospitaliers (PH) sur quatre appellent à la grève le 19 avril, en signe de rejet des premières propositions des pouvoirs publics : dix jours de vacances supplémentaires, une semaine de 44 heures de travail effectif, gardes comprises mais activité libérale exclue. Au regard de ce que veulent les PH, ces dispositions relèvent, selon certains, de la « provocation ».
« Le Quotidien » fait le point sur les revendications des organisations syndicales.
La Confédération des hôpitaux généraux (CHG)
Elle distingue deux modalités possibles de passage aux 35 heures pour les PH. Aux médecins dits « à horaires contraints » (urgentistes, anesthésistes, obstétriciens...), la CHG propose une rémunération, sous forme d'heures supplémentaires, de toutes les heures de travail effectuées au-delà de 35 heures et dans une limite de 46 heures (gardes comprises, astreintes comprises pour 30 % de leur durée effective). Les heures supplémentaires sont 50 % mieux payées la nuit et les jours fériés. Les autres praticiens ne changent rien à leur activité actuelle (si ce n'est qu'elle ne doit plus excéder 46 heures, gardes comprises) mais ils gagnent 22 jours de congé supplémentaires, éventuellement cumulables. La CHG, qui accuse le gouvernement de vouloir « démanteler » le statut des PH, appelle ces derniers à faire grève le 19 avril et organise une semaine d'action entre le 23 et le 29 avril.
Le Syndicat national des médecins, chirurgiens, spécialistes et biologistes des hôpitaux publics (SNAM-HP)
Il se bat pour que l'activité libérale à l'hôpital, les activités d'enseignement et de recherche ainsi que les activités d'intérêt général et les expertises quand elles existent soient incluses dans le temps de travail effectif des PH. Le SNAM estime qu'en passant à 35 heures les PH doivent gagner au moins 23 jours de congé supplémentaires par an (cumulables sur dix années au plus dans un compte-épargne-temps), dès l'année prochaine. Le SNAM a été le premier à réagir aux propositions des pouvoirs publics. Estimant que le ministère fait, sur ce dossier, preuve de « mépris » à l'égard des médecins des hôpitaux, il est à l'origine de la grève annoncée du 19 avril.
L'Intersyndicat national des praticiens hospitaliers (INPH)
Il souhaite que les 35 heures soient effectives pour les PH dès le 1er janvier 2002, et non à partir d'octobre 2003, comme l'a proposé le gouvernement. Pour l'INPH, les 35 heures correspondent au salaire minimal conventionnel qu'est la grille de rémunération des PH. Au-delà, et alors que les gardes sont intégrées au temps de travail, les heures de travail des PH doivent être payées en heures supplémentaires dans une limite de 48 heures (ce qui correspondrait, calcule l'Intersyndicat, à des hausses de salaire de l'ordre de 30 % à 40 %). L'INPH, qui n'a pas appelé pour l'instant à la grève, fait savoir qu'il « se réserve le droit de mettre en uvre des journées d'action au cas où les revendications des praticiens toutes catégories confondues ne seraient pas entendues ».
La Coordination médicale hospitalière (CMH)
Elle veut que le statut unique des praticiens hospitaliers soit préservé, que les modalités de réduction du temps de travail soient à la fois « simples » et les mêmes pour tous. La CMH prône 8 demi-journées de travail hebdomadaire, soit 4 jours en moyenne par semaine. Le temps de travail, qui inclut le temps de garde et le temps travaillé pendant l'astreinte, ne doit pas être inférieur à 35 heures ni dépasser les 48 heures de la réglementation européenne. Se réclamant de la loi Aubry II, la CMH demande pour les PH 17 jours de congé supplémentaires (hors FMC).
Le Dr Pierre Faraggi (CHG) : ce n'est pas une discussion commerciale
Dans un entretien avec « le Quotidien », le Dr Pierre Faraggi, président de la Confédération des hôpitaux généraux (CHG), s'indigne de la manière dont les pouvoirs publics ont engagé la négociation sur la réduction de travail des médecins hospitaliers.
LE QUOTIDIEN - On a un peu l'impression que les médecins hospitaliers sont partis négocier les 35 heures, la fleur au fusil, et qu'ils ont vite déchanté. Est-ce une vision réaliste des choses ?
Dr PIERRE FARAGGI - C'est vrai qu'on a été un peu pris à froid par les premières propositions - scandaleuses - des pouvoirs publics. Mais nous n'avions jamais imaginé que cela allait être facile. Le ministère s'inscrit dans cette négociation comme peuvent le faire les parties d'une discussion commerciale : il espère obtenir le maximum de services pour une addition le moins chère possible. Une position à la limite compréhensible, si l'hôpital avait la possibilité de créer des postes au fur et à mesure qu'il allégerait la charge de travail de ses médecins. Or nous sommes loin de ces conditions-là : le temps de travail des médecins hospitaliers est très au-dessus de la durée légale du travail. A cela s'ajoutent les problèmes de la démographie médicale. Dans ce contexte, nos aspirations à nous, médecins hospitaliers, ne peuvent être satisfaites que sous forme de compensation.
Vous avez déposé un préavis de grève pour le 19 avril. Les praticiens hospitaliers sont-ils très impatients sur ce dossier ?
Le problème est que les médecins de l'hôpital, dans leur grande majorité, ne connaissent pas ce chantier des 35 heures. Cependant, quand nous diffusons les propositions qui nous ont été faites, les réactions sont très fortes.
Avez-vous chiffré le coût de l'application de vos propres revendications en matière de réduction du temps de travail ?
Je ne dispose par de tous les éléments pour mesurer ce coût précisément. Les calculs sont compliqués, ne serait-ce que parce qu'ils incluent l'application des normes européennes. Considérer la garde comme du temps de travail, cela a un coût qui n'est pas négligeable. Toutefois, j'estime que l'application toute bête de l'aménagement et de la réduction du temps de travail des praticiens hospitaliers (PH) , qu'elle se fasse par forfait ou sous forme d'heures supplémentaires (voir par ailleurs le détail des revendications de la CHG), pourrait représenter entre 8 et 12 % de charge supplémentaire sur l'enveloppe des PH.
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature