Alzheimer : après le singe, une thérapie génique serait possible chez l'homme

Publié le 15/02/2001
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U N essai de phase I d'une thérapie génique chez deux sujets atteints de maladie d'Alzheimer devrait commencer dans quelques mois aux Etats-Unis. Il pourrait être suivi peu de temps après de six autres essais.

Ces tentatives ont été annoncées par Mark Tuszynski et James Conner, chercheurs à l'université de Californie. Il s'agirait de la première tentative de thérapie génique à visée cérébrale dans une indication autre qu'un cancer.
Cette annonce a été faite à l'agence Associated Press en même temps que la publication dans les « PNAS » d'un travail mené par ces mêmes chercheurs chez le singe. Ils montrent le bénéfice d'une thérapie génique reposant sur des fibroblastes autologues modifiés afin de produire un facteur de croissance nerveux.
Dix-huit singes rhésus ont servi de champ d'expérience à l'équipe américaine. Certains jeunes, de 9,5 ans (ce qui équivaut à 22 ans chez l'humain), d'autres âgés, de 22 à 27,5 ans (de 60 à 70 chez l'homme). Chez le primate, le vieillissement s'accompagne d'une diminution des fonctions cognitives. Même si les bases moléculaires et structurelles de ce déclin ne sont pas tout à fait claires, une perte étendue de cellules n'est pas considérée comme naturelle (chez l'humain non plus).

Une réduction de 25 % de l'innervation corticale

Le travail américain montre, dans un premier temps, que le vieillissement s'accompagne d'une réduction de 25 % de l'innervation corticale par le système cholinergique chez le singe rhésus. Ce déclin a pu être amélioré substantiellement par l'apport d'un facteur de croissance nerveux délivré par les cellules modifiées génétiquement. Fait important : les implants ont été réalisés dans des sites corticaux éloignés des zones déficitaires (plus précisément cinq dans chaque hémisphère). Des travaux antérieurs chez l'animal n'avaient montré de bénéfice qu'avec des implants réalisés in situ. Les effets du facteur de croissance sur la densité des axones cholinergiques ont été surtout nets dans les régions corticales innervées par la population de cellules Ch4i visées par les greffons.
Le mécanisme de la perte de l'innervation cholinergique et de l'atrophie des cellules cholinergiques lié à l'âge n'est pas encore établi. Une diminution de la production de NGF par le cortex liée à l'âge n'a pas été décrite, que ce soit dans un contexte pathologique ou non. Enfin, une diminution de l'expression des récepteurs à la neurotrophine des neurones cholinergiques de la région frontale a été rapportée au cours de l'Alzheimer. Ce qui conduit les auteurs à conclure que, indépendamment du mécanisme impliqué, l'apport dans le système cholinergique frontal d'un facteur de croissance peut sembler rationnel dans un contexte d'affection neurodégénérative telle que la maladie d'Alzheimer.

Proceedings of the National Academy of Sciences, 13 février 2001, vol. 98, p. 1941-1946.

Dr Guy BENZADON

Source : lequotidiendumedecin.fr: 6858