Arrêt de commercialisation du Cytotec, et objectif zéro médicament pendant la grossesse : les chantiers de l’ANSM

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Publié le 20/10/2017
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Crédit photo : S. Toubon

Le laboratoire Pfizer, qui commercialise le Cytotec, a annoncé que ce médicament ne serait plus distribué en France à partir du 1er mars 2018. Initialement prévu contre l’ulcère de l’estomac, le Cytotec est largement utilisé, hors AMM, pour le déclenchement des accouchements, ainsi que pour l’IVG médicamenteuse. L’ANSM est revenu sur ce sujet particulier et celui plus général de l’utilisation hors AMM, lors d’une rencontre avec la presse.

« Le misoprostol, principe actif du Cytotec, n’est pas en cause, a insisté le Dr Dominique Martin, directeur général de l’ANSM. Les problèmes viennent de son utilisation par voie intravaginale (alors qu’il est prévu pour une voie orale) ; et, pour le déclenchement des accouchements, du fait qu’il faut couper en huit le comprimé pour avoir la dose correcte, avec l’imprécision que cela suppose, et donc un risque de surdosage. » Alors qu’il existe des médicaments qui ont leur AMM dans les deux indications, et par voie orale. « Nous avons émis plusieurs alertes, rappelle Dominique Martin, mais les sociétés savantes et les praticiens préféraient le Cytotec. »

Face à l’annonce de l’arrêt de commercialisation du Cytotec, l’ANSM a convenu avec les laboratoires commercialisant les médicaments contenant du misoprostol et prévus pour l’IVG médicamenteuse (Gymiso et Misoone) que ces derniers augmentent leur production. Une procédure accélérée est aussi en cours pour donner son AMM à un autre médicament, qui, par voie orale et à la dose correcte, pourra être utilisée pour le déclenchement de l’accouchement. « Notre engagement est de faire en sorte qu’il n’y ait pas de rupture », insiste Dominique Martin.

« L’hors AMM est possible, tant qu’il n’est pas massif »

Dominique Martin rappelle qu’il n’est pas dans les prérogatives de l’ANSM de faire la police des pratiques et que « l’AMM est protectrice, et l’hors AMM, quoique possible car elle relève de la relation médecin/malade, ne doit pas être massive et doit suivre certaines règles (par exemple, ne pas être employée s’il existe des alternatives) », a-t-il indiqué.

Médicaments pendant la grossesse, la France dans les mauvais élèves

Juste après une alerte de l’ANSM sur certains antihypertenseurs (ARA II et IEC) qui sont contre-indiqués pendant les 2e et 3e trimestres de la grossesse, l’Agence met en perspective la prescription médicamenteuse en général chez la femme enceinte. « Nous sommes l’un des pays où les taux de prescription chez les femmes enceintes sont les plus élevés », précise Dominique Martin. Environ 10 médicaments prescrits en France, contre 2 à 3 aux États-Unis et en Europe du Nord. « Une situation qui est aussi problématique socialement, souligne Dominique Martin, puisque les plus favorisés socialement prennent moins de médicaments et davantage de supplémentation vitaminique conseillée, alors que c’est l’inverse pour les moins favorisés. »

Ce sujet est devenu une priorité pour l’ANSM qui a créé une cellule dédiée à la question des médicaments pendant la grossesse. « Nous nous fixons comme objectif de faire baisser l’exposition des femmes aux médicaments pendant la grossesse », insiste Dominique Martin. « Nous continuons à informer les prescripteurs mais cela ne suffit pas et il faut multiplier les canaux pour informer directement les patients (par exemple avec le pictogramme présent sur les boîtes de médicaments). »


Source : lequotidiendumedecin.fr