Au nom du principe de précaution, un maire s'oppose aux antennes de radiotéléphonie

Publié le 22/02/2001
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« I L n'est pas normal que le maire porte la responsabilité des problèmes de santé publique » que peuvent provoquer l'implantation des antennes de radiotéléphonie, s'exclame le maire de Niort, Bernard Bellec (PS).

Interpellé par des riverains inquiets, il a décidé d'interdire l'implantation, par arrêté municipal, de toute installation d'équipements de radiotéléphonie sur le territoire de sa commune, à moins de 300 mètres d'une habitation. « France Telecom a décidé d'implanter un pylône de 36 mètres de haut au cœur d'un quartier complètement urbanisé, explique le premier magistrat de la préfecture des Deux-Sèvres. Je n'ai pas pu m'y opposer, puisque l'installation d'antennes radiotéléphoniques ne nécessite pas de permis de construire. »
L'unique obligation qui incombe aux différents opérateurs de téléphonie est de déclarer les installations.
Ce type d'antenne est pourtant tout à fait banal, assure-t-on chez France Telecom ; c'est une antenne parmi celles que l'on trouve partout, y compris sur le territoire de Niort. « Il s'agissait au départ d'une opération qui ne posait pas de problème, s'étonne l'un des responsables de l'entreprise. Mais aucun équipement n'est installé sans que l'emplacement n'ait été auparavant négocié avec les élus et les riverains. Nous tiendrons compte de la réaction des habitants. »
Nécessaire pour développer le réseau de téléphonie mobile Itinéris, cette antenne devait tout d'abord être placée sur un château d'eau de la commune. Mais les discussions sur le prix de la redevance due par France Telecom à la ville ayant échoué, un autre emplacement a été trouvé, sur le terrain d'un propriétaire privé, à 50 mètres des premières maisons. Outre le problème esthétique posé par les 36 mètres de hauteur du pylône, les riverains ont avancé celui de santé publique. « Plusieurs personnes qui habitent le quartier ont des ennuis cardiaques, précise Bernard Bellec. Certains sont même porteurs d'un pacemaker. Puisque l'on ne sait pas aujourd'hui quelles peuvent être les conséquences pour la santé du voisinage de ces antennes, il existe un risque, d'autant plus pour ces personnes fragilisées. »

Les précautions des experts

Le maire de Niort s'appuie principalement sur les conclusions du groupe d'experts chargé par la direction générale de la Santé d'analyser les données scientifiques disponibles en matière de risques pour la santé liés à l'utilisation des téléphones portables (« le Quotidien » du 9 février). Si rien ne prouve que les équipements de téléphonie mobile représentent des menaces pour la santé, les experts émettent toutefois des recommandations relatives à la réduction des expositions de la population. Ainsi, ils prônent, « pour la gestion des risques potentiels associés à la téléphonie mobile, une approche s'inspirant du principe de précaution ». Tout en soulignant qu' « il ne retient pas l'hypothèse que le voisinage de stations de base peut occasionner un risque pour la santé », le groupe d'experts propose que « les bâtiments sensibles (hôpitaux, crèches, écoles) situés à moins de 100 mètres d'une station de base, en milieu urbain, ne soient pas atteints directement par le faisceau de l'antenne ».
Face à ces recommandations, les pouvoirs publics ont décidé non seulement de recenser, avec l'Agence national des fréquences (ANFr) et les opérateurs de téléphonie mobile, tous les sites considérés comme sensibles, mais également de procéder à des évaluations « et, si cela est utile, à des mesures de champs radio-électriques dans ces sites afin de s'assurer qu'ils sont bien en deçà des valeurs limites d'exposition transcrite en droit français ».
Cependant, pour le maire de Niort, ces décisions ne sont pas suffisantes. Refusant d'endosser une quelconque responsabilité en la matière, il demande que les parlementaires se saisissent du problème pour instaurer une loi réglementant l'implantation des antennes.

Stéphanie HASENDAHL

Source : lequotidiendumedecin.fr: 6863