D ANS le cancer de la prostate, l'os est le principal site de progression non androgénodépendante, et parfois le seul site de métastase.
Il existe une relation directe entre l'atteinte osseuse et la survie : les patients qui ont des métastases osseuses évolutives ont une médiane de survie de 9 mois, voire moins. Dès lors, on comprend que la mise au point d'un traitement ciblant l'os serait bénéfique. Dans ce contexte, l'équipe de Shi Ming-tu (M. D. Anderson Medical Center, Houston, Texas) a déjà réalisé (« Urol. Oncol. », 1996) un essai de faisabilité avec la combinaison de doxorubicine et d'un radio-isotope, le strontium 89 (Sr-89). Elle a maintenant testé cette association en tant que traitement de consolidation chez des patients sélectionnés, menacés par la progression osseuse et répondant à une chimiothérapie d'induction.
L'objectif était de voir si une stratégie ciblant l'os pouvait être bénéfique dans le carcinome non androgénodépendant avancé de la prostate.
Les auteurs ont donc recruté 105 patients ayant ce type de cancer avec atteinte osseuse, la maladie étant progressive, mais l'espérance de vie étant établie, selon l'échelle de Zubrov, à douze semaines ou plus.
D'abord, une chimiothérapie d'induction
Dans un premier temps, les patients ont reçu deux ou trois cures de chimiothérapie d'induction : aux semaines 1, 3 et 5, doxorubicine et kétoconazole ; aux semaines 2, 4 et 6, vinblastine et estramustine. Tous les patients recevaient en plus de l'hydrocortisone.
Au terme de ce traitement d'induction, les patients stables ou répondeurs (n = 72) ont été inclus dans la poursuite de l'essai, afin de recevoir un traitement de consolidation. Tous ont reçu de la doxorubicine pendant six semaines ; la moitié des patients a reçu en plus une dose de strontium 89 pendant la première semaine, juste après l'administration de doxorubicine ; l'autre moitié n'a reçu qu'un placebo en plus.
Les résultats en termes de délai de progression de la maladie sont les suivants :
- 1,9 mois pour les patients qui n'ont pas reçu de traitement de consolidation ;
- 7 mois pour ceux qui n'ont reçu que la doxorubicine ;
- 13,9 mois pour ceux qui ont reçu en plus le strontium 89.
Pour ce qui est de la survie globale, les résultats sont :
- 11,1 mois en l'absence de traitement de consolidation ;
- 16,8 mois en cas de traitement de consolidation avec la doxorubicine seule ;
- 27,7 mois avec l'association doxorubicine et strontium 89.
On le voit, les patients qui ont reçu le strontium 89 ont eu un plus long délai de progression et une survie globale plus longue.
Comment expliquer cet effet additionnel du strontium ? On ne le sait pas très bien. Il pourrait influer sur la croissance des cellules néoplasiques.
Cet essai ne permet pas de conclure définitivement sur l'intérêt de l'association doxorubicine-strontium 89 en ce qui concerne la survie des patients qui ont un cancer prostatique non androgénodépendant métastasé. Mais, comme l'indique un éditorialiste, « les données sont suffisamment fortes pour justifier des travaux ultérieurs sur les traitements ciblant l'os chez de tels patients ».
L'éditorialiste rappelle, en outre, que d'autres traitements ciblant l'os ont été étudiés dans le cancer prostatique. Les bisphosphonates, explique-t-il, inhibent l'invasion osseuse par les cellules des carcinomes mammaires et prostatiques (l'invasion est un phénomène précoce). Ce qui suggère que les bisphosphonates peuvent être utiles en prophylaxie dans les cancers qui métastasent préférentiellement à l'os.
« Lancet » du 3 février 2001, pp. 336-341 et 326 (éditorial).
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