DES CHERCHEURS britanniques viennent de découvrir une mutation génétique acquise qui serait à l'origine de plusieurs affections myéloprolifératives. Cette mutation altère l'activité d'une protéine kinase impliquée dans la transduction des signaux envoyés par les facteurs de croissance, la tyrosine kinase JAK2. Elle est retrouvée chez la quasi-totalité des patients affectés d'une maladie de Vaquez et chez au moins la moitié de ceux atteints d'une thrombocythémie essentielle ou d'une myélofibrose idiopathique.
Facteurs de croissance.
Si la plupart des affections myéloprolifératives sont connues et décrites depuis près de vingt-cinq ans, on ne sait pratiquement rien de leur pathogenèse moléculaire. In vitro, il a été démontré que les progéniteurs érythroïdes des patients souffrant de la maladie de Vaquez forment facilement des colonies, y compris en l'absence d'érythropoïétine. De plus, plusieurs études ont montré que les progéniteurs érythroïdes et myéloïdes de ces patients, ainsi que ceux des sujets atteints d'une thrombocythémie essentielle ou d'une myélofibrose idiopathique sont hypersensibles à différents facteurs de croissance. Il a donc été avancé l'hypothèse selon laquelle un dysfonctionnement des voies activées par les facteurs de croissance serait à l'origine du développement de ces maladies myéloprolifératives.
Diverses pathologies myéloïdes malignes (notamment certaines leucémies) étant associées à une altération de l'activité des tyrosines kinases, Baxter et coll. ont décidé de s'intéresser plus particulièrement à cette famille de protéines. Ils ont ensuite choisi de focaliser leur attention sur une tyrosine kinase cytoplasmique, JAK2, impliquée dans la transduction du signal induit par les facteurs de croissance.
Séquençage des exons.
Concrètement, les chercheurs ont analysé l'ADN des granulocytes périphériques de 140 patients atteints d'affections myéloprolifératives. La totalité des exons du gène JAK2 ont été méthodiquement séquencés. Ce travail a permis de mettre en évidence une mutation ponctuelle G -> T touchant le douzième exon du gène chez 66 des malades analysés. Cette mutation conduit au remplacement d'un acide aminé très conservé, en l'occurrence une valine, par une phénylalanine. Elle n'est pas retrouvée dans les lymphocytes T des malades et n'est présente que dans certains de leurs granulocytes. Cela signifie que la mutation est acquise.
La technique du séquençage ne permet de détecter la mutation que lorsqu'elle est présente dans plus de 40 % des cellules analysées. Afin de pouvoir réaliser une meilleure évaluation de la proportion des patients ayant acquis cette mutation, Baxter et coll. ont mis au point un protocole de PCR ultrasensible autorisant la détection des sujets qui ne portent la mutation que dans 3 % de leurs granulocytes périphériques. Grâce à ce procédé, la mutation a pu être mise en évidence chez 46 patients supplémentaires.
Nouvelles voies ouvertes.
Au final, la mutation G -> T a été identifiée chez 97 % des sujets atteints d'une maladie de Vaquez (71 sur 73), chez 57 % de ceux souffrant de thrombocythémie essentielle (29 sur 51) et chez 50 % de ceux atteints de myélofibrose idiopathique (8 sur 16). Elle n'a pu être détectée chez aucun des 90 témoins testés.
Cette découverte pourrait conduire à la mise en place de nouvelles approches dans le diagnostic, la classification et le traitement des affection myéloprolifératives.
Baxter EJ et coll. « The Lancet » du 19 mars 2005.
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