Exploration d’une Infertilité

Des causes exclusivement masculines dans 25 % des cas

Publié le 15/10/2015
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« Les causes d’infertilité sont à 21 % du ressort exclusif de l’homme, 39 % sont mixtes (avec donc une participation masculine) », rapporte le Pr Jean-Marie Antoine, gynécologue-obstétricien et médecin de la reproduction à l’Hôpital Tenon (Paris), ce qui justifie l’interrogatoire (une intoxication tabagique ?), un examen clinique (un surpoids, des signes d’hypogonadisme ou de Klinefelter ?) et des examens complémentaires.

Un, « le test post-coïtal de Hühner, franco-français, souligne-t-il, parce qu’il n’existe qu’en France », a-t-il précisé lors d’une session aux Entretiens de Bichat (Paris). Sur cet examen de débrouillage, on apprécie la mobilité des spermatozoïdes (de 10 à 20 par champ microscopique) dans la glaire à la période de l’ovulation, à un pH compris entre 6,5 et 8,5. Il permet au moins de vérifier que des rapports sexuels se sont bien produits, et qu’ils ont été complets. Si le test est négatif, il peut être renouvelé ou enrichi par d’autres tests.

Autre examen, de base, le spermogramme, après une abstinence de 3 à 5 jours, les valeurs normales étant celles du laboratoire où s’est déroulé l’examen. Il existe différentes situations d’anormalité (forme et/ou mobilité). Un spermogramme anormal doit être répété après 3 mois avant d’envisager une ICSI, éventuellement après une préparation des spermatozoïdes pour choisir plus sûrement la technique d’AMP.

Écarter une infection

Une spermoculture peut être envisagée pour écarter une infection, la seule raison curable d’infertilité, ainsi que des sérologies en amont des techniques d’AMP (où elles seront de toute façon demandées). Une biochimie séminale est utile pour différentier azoospermie sécrétoire ou obstructive ; des dosages hormonaux, pour détecter une insuffisance hypothalamo-hypophysaire, une insuffisance testiculaire primitive ou une hyperprolactinémie.

L’imagerie d’une part (échographie testiculaire, parfois endorectale, rénale et doppler pour écarter un varicocèle testiculaire), le bilan génétique d’autre part (moins de 2 millions de spermatozoïdes par ml indiquent un caryotype), voire une biopsie testiculaire en cas d’azoospermie, complètent le bilan à la recherche de causes curables, par la médecine, la chirurgie ou des techniques d’AMP.

Pour traiter une infertilité masculine, quatre pistes peuvent être empruntées. La première étant « l’amélioration des techniques d’AMP dès la phase de sélection des spermatozoïdes, sur leur potentiel de migration », propose le Dr Xavier Pollet-Villard, biologiste de la reproduction à l’Hôpital Tenon. Autres méthodes pour déterminer les gamètes « à haut potentiel », leur charge (négative) ou leur potentiel de fixation à l’acide hyaluronique, des paramètres dont il reste à démontrer l’intérêt sur le taux de naissances vivantes… avant de l’intégrer dans les pratiques.

Deuxième suggestion pour traiter l’infertilité masculine, le traitement médical, hormones ou antioxydants. Les gonadotrophines seraient utiles en cas de spermatogénèse déficiente ; la FSH pourrait avoir un intérêt sur une infertilité idiopathique, intérêt mesuré sur le taux de spermatozoïdes et les grossesses cliniques. Les antioxydants ont fait la preuve (avec un niveau faible) de leur efficacité sur les grossesses spontanées ou en AMP.

Troubles réversibles

Troisième voie, les nouvelles techniques de chirurgie, microchirurgie assistée par robot, relié au microscope du biologiste, pour mieux cibler les prélèvements par exemple. En cas de biopsie testiculaire négative, une solution alternative serait de congeler des fragments de pulpe testiculaire, puis de les faire maturer in vitro avec des cellules souches spermatiques.

Plus naturelle, et rapidement efficace, la prévention de l’infertilité, par la correction d’un certain nombre de facteurs environnementaux, tabac, cannabis et/ou alcool. Les troubles induits par ces toxiques sont réversibles en un cycle de spermatogénèse (moins de trois mois). « Autres déterminants de la fertilité, le surpoids, le stress psychologique, l’exposition aux perturbateurs endocriniens (hydrocarbures par exemple) et à la chaleur, l’imprégnation androgénique des adeptes de musculation doivent être autant que possible normalisés pour un bénéfice palpable sur la fertilité certes, mais encore la bonne santé de l’homme et de sa descendance », insiste le Dr Pollet-Villard.

Dr Brigitte Blond

Source : Le Quotidien du Médecin: 9441